Par Laurent Dumond, Conseiller régional MUP d’Ile-de-France, Vice-Président de l’Agglomération de Cergy-Pontoise, Conseiller municipal de Cergy.
Au lendemain des élections internes de l’UMP et malgré l’engagement de milliers d’individus, l’image de la politique est une nouvelle fois écornée, le discrédit plus important encore et il est à craindre que seuls les organisations et dirigeants populistes tirent profit d’un tel évènement.
Mesurons aussi qu’au-delà de la manière et des images détestables, cet épisode traduit une certaine droitisation de la société et montre un corps militant de l’UMP pouvant désormais envisager sans tabou de possibles relations avec l’extrême droite française.
Aucun responsable politique ou militant ne peut penser sortir indemne de ce qui vient de se passer à l’UMP et cet évènement affligeant renforce, s’il en était besoin, la nécessité de redonner du sens à la relation entre citoyens et représentants des forces politiques.
Ne nous cachons pas derrière les appareils, leurs fonctionnements plus ou moins vertueux. Nous sommes confrontés à une question : celle du pouvoir, qu’il soit personnel, collectif, institutionnel. Cette question ne concerne pas que les femmes et les hommes politiques mais, même envisagé au service de la plus belle des causes, le pouvoir pèse sur celles et ceux qui ont à l’exercer.
Ce qui vient de se passer ne remet pas en cause l’engagement individuel et collectif. Tout au contraire, il renforce la nécessité de ne pas laisser le terrain de la politique à des élites ou des appareils. C’est aussi pourquoi le chantier de la nécessaire rénovation de la vie politique et publique sur lequel Lionel Jospin avait été chargé de plancher était attendu. Malheureusement, les préconisations issues de la commission Jospin n’apparaissent vraiment pas comme voulant aller au fond des choses et les fondations de la rénovation qu’elles devaient être, bien fragiles.
Aujourd’hui, des catégories sociales entières sont exclues des mandats politiques importants. Rien, ou si peu, ne favorise un engagement citoyen qui même localement demande du temps, toujours plus de technicité. Le renouvellement des appareils politiques et la rotation des cadres n’est toujours pas quelque chose de naturel… Pourtant, la commission Jospin vient de décider de ne pas aborder la question du statut de l’élu et du militant associatif. Or, sans cette avancée, il n’est pas de progrès possible. Lionel Jospin s’y était déjà refusé quand il était aux affaires. Depuis, le fossé n’a cessé de se creuser entre citoyens et politiques.
La commission Jospin avait toute latitude de faire de la mise en place d’un véritable statut de l’élu assumé nationalement un préalable. Le choix de ne pas préconiser les raisons et les contours de cet engagement national est un signe négatif car il vise à se satisfaire d’une vie politique trustée par les fonctionnaires et hauts fonctionnaires, les professions libérales, les chefs d’entreprises et les ténors et permanents émanant des partis politiques suffisamment solides financièrement.
Par conséquent, le refus d’envisager sérieusement le statut de l’élu relativise toutes les préconisations portant sur la transparence de la vie politique.
Par ailleurs, les préconisations de la commission focalisent le non cumul des mandats sur les seuls parlementaires alors que la question de la multiplicité des mandats et des fonctions, dans le temps et la durée, ne relève pas de l’exclusivité parlementaire.
L’absence d’un statut protecteur de l’élu entérinerait une certaine professionnalisation du mandat de parlementaire et dans le même temps une précarisation de la situation du député ou du sénateur toujours sujet au non renouvellement de leur mandat si une loi n’encadre pas la reprise de son activité salariée.
De plus, la dose homéopathique de proportionnelle proposée n’est pas de nature à redonner du sens à cette forme de scrutin et, par conséquent, s’ajoute à des préconisations remises au Président de la République qui me paraissent bien timides, restrictives et peu susceptibles de combler la détérioration des rapports entre la politique, ses représentants et les citoyens.
Alors que je suis partisan d’un non cumul des mandats et des fonctions, dans le temps et la durée, devant s’appliquer à tous, je considère que tant que ne sera pas initié, discuté, proposé, un véritable statut national des élus, ce serait une tromperie de s’en tenir à des règles strictes visant essentiellement les parlementaires et favorisant, au final, un bipartisme ne reflétant pas la réalité de la vie politique de notre pays.
Des échéances politiques importantes se dessinent. Les élections municipales sont celles qui nécessitent l’engagement collectif et citoyen le plus important. Il est donc urgent de débattre des moyens permettant cet engagement et de faire en sorte qu’à cette occasion émerge, grâce à cette avancée démocratique, toute une nouvelle génération de citoyens-élus. La question est donc, au-delà des déclarations d’intentions et de principe sur le bien fondé du statut de l’élu, de savoir si le gouvernement veut réellement s’y investir.
Cet investissement aura un coût significatif. Il sera contraire aux préconisations des agences de notation qui ressortent du bois, aux dogmatiques de la baisse de la dépense publique. Et alors ? Le jeu n’en vaut il pas la chandelle ? Une certitude demeure : il serait pire que tout de vouloir transférer cet investissement sur des collectivités territoriales, qui financeraient l’amélioration des conditions d’application du mandat de leurs propres élus. Cela serait là encore sous-estimer le regard des citoyens sur nos fonctionnements actuels.
Laurent Dumond
Conseiller Régional d’Ile de France aussi de Vice-président de l’Agglomération de Cergy-Pontoise aussi Conseiller municipal de Cergy et salarié et militant progressiste (bref un bel exemple utile à la rénovation de la vie politique).