Pistes de réflexions et d'actions

L’objectif des progressistes réunis dans le MdP est de mettre en œuvre des réformes réellement ambitieuses, « radicales », qui comme l’étymologie du mot l’indique, s’attaquent aux racines du mal – tant sur les plans national et international que social et politique, économique ou écologique. Ces réformes doivent participer et contribuer au respect de la dignité humaine et à la paix dans le monde.

Elles sont articulées autour de cinq axes :

   – La définition d’une véritable éthique de la vie politique et la formation d’une République nouvelle
   – L’approfondissement de la démocratie sociale et citoyenne
   – Le combat pour une mondialisation solidaire et pacifique
   – La reconstruction sociale autour des principes de justice sociale, d’égalité, d’accès aux savoirs et à la culture
   – La défense des libertés individuelles et collectives, de la tranquillité publique et d’une justice réellement indépendante

Table des matières

UNE NOUVELLE ETHIQUE INSTITUTIONNELLE ET POLITIQUE

La « désaffection partisane » prend électoralement aujourd’hui la forme d’une abstention de plus en plus assumée. Des millions de Français désertent maintenant les urnes. L’abstention traverse tous les courants et concerne toutes les couches de la population – mais particulièrement les jeunes et les couches moyennes et populaires. Cette démobilisation exprime pourtant moins une perte de citoyenneté qu’elle ne traduit une insatisfaction vis-à-vis de « l’offre » politique traditionnelle. Elle n’est nullement le résultat d’une négligence ou d’un désintérêt des électeurs, mais un appel sans précédent, un cri civique lancé à la représentation politique, jugée trop liée aux puissances d’argent, à « ceux d’en haut », et faite de « beaux parleurs » loin des préoccupations quotidiennes des « petites » gens.

Cette situation inédite appelle sans délai une mobilisation démocratique exceptionnelle de l’ensemble des citoyens. Si le message des abstentionnistes n’était pas entendu, le rejet des politiques pourrait, à la veille du scrutin présidentiel, catalyser une colère populaire aux conséquences électorales imprévisibles. Pourtant, la célérité avec laquelle la plupart des partis politiques ont tourné la page des dernières échéances électorales relève d’un déni démocratique gravissime. En cherchant avant tout à se préserver eux-mêmes, à accroître leur domination sur les autres ou à lutter pour leur propre survie, ils se sont détournés des souffrances personnelles et collectives comme des aspirations nouvelles qui surgissent.

Les Français, répétons-le, s’ils se désintéressent des jeux partisans, restent attentifs aux affaires publiques, qu’ils considèrent comme leurs affaires. Ce qu’ils désirent n’est pas une politique qui aille des partis au peuple, mais une politique qui aille du peuple aux partis, et dans laquelle les citoyens ne soient pas à la remorque, mais à l’initiative.

Les progressistes du MUP entendent donc développer la démocratie sociale et citoyenne, dite aussi parfois « participative » ou « de proximité » ; ils veulent ressourcer le système de représentation au moyen de la démocratie directe. Il s’agit pour eux de stimuler partout l’échange démocratique, de susciter la parole, de faire se rencontrer des responsables de différents secteurs entre eux et avec la population.

Le partage des responsabilités concerne toutes les institutions, tous les lieux de décision. Et d’abord l’entreprise. Celle-ci doit être un lieu d’échanges entre tous ceux qui concourent à son fonctionnement. Les salariés doivent gérer davantage les affaires économiques, qui sont leurs affaires après tout ; ils doivent être associés à toutes les décisions qui concernent la vie et le développement de leur entreprise : il y va de la démocratie économique.

De la même façon il nous semble essentiel de promouvoir une gestion citoyenne des dépenses publiques et d’associer autant que faire se peut l’épargne individuelle et le progrès social (construction d’HLM, prêt au PME en difficultés, développement des services publics…)

La participation concerne aussi l’école. L’association des élèves à l’organisation et à la vie de l’école est capitale. L’élève qui participe se trouve beaucoup plus motivé, et donc impliqué, que l’élève passif, à qui l’on ne reconnaît aucun droit d’initiative. Il appartient aux enseignants d’éveiller chez leurs élèves le goût des responsabilités et le désir d’en assumer. Ne l’oublions pas : le meilleur apprentissage de la citoyenneté est son exercice effectif.

Chaque citoyen en somme doit avoir la possibilité de peser sur les décisions prises dans la société.

L’APPROFONDISSEMENT DE LA DEMOCRATIE SOCIALE ET CITOYENNE

La « désaffection partisane » prend électoralement aujourd’hui la forme d’une abstention de plus en plus assumée. Des millions de Français désertent maintenant les urnes. L’abstention traverse tous les courants et concerne toutes les couches de la population – mais particulièrement les jeunes et les couches moyennes et populaires. Cette démobilisation exprime pourtant moins une perte de citoyenneté qu’elle ne traduit une insatisfaction vis-à-vis de « l’offre » politique traditionnelle. Elle n’est nullement le résultat d’une négligence ou d’un désintérêt des électeurs, mais un appel sans précédent, un cri civique lancé à la représentation politique, jugée trop liée aux puissances d’argent, à « ceux d’en haut », et faite de « beaux parleurs » loin des préoccupations quotidiennes des « petites » gens.

Cette situation inédite appelle sans délai une mobilisation démocratique exceptionnelle de l’ensemble des citoyens. Si le message des abstentionnistes n’était pas entendu, le rejet des politiques pourrait, à la veille du scrutin présidentiel, catalyser une colère populaire aux conséquences électorales imprévisibles. Pourtant, la célérité avec laquelle la plupart des partis politiques ont tourné la page des dernières échéances électorales relève d’un déni démocratique gravissime. En cherchant avant tout à se préserver eux-mêmes, à accroître leur domination sur les autres ou à lutter pour leur propre survie, ils se sont détournés des souffrances personnelles et collectives comme des aspirations nouvelles qui surgissent.

Les Français, répétons-le, s’ils se désintéressent des jeux partisans, restent attentifs aux affaires publiques, qu’ils considèrent comme leurs affaires. Ce qu’ils désirent n’est pas une politique qui aille des partis au peuple, mais une politique qui aille du peuple aux partis, et dans laquelle les citoyens ne soient pas à la remorque, mais à l’initiative.

Les progressistes du MUP entendent donc développer la démocratie sociale et citoyenne, dite aussi parfois « participative » ou « de proximité » ; ils veulent ressourcer le système de représentation au moyen de la démocratie directe. Il s’agit pour eux de stimuler partout l’échange démocratique, de susciter la parole, de faire se rencontrer des responsables de différents secteurs entre eux et avec la population.

Le partage des responsabilités concerne toutes les institutions, tous les lieux de décision. Et d’abord l’entreprise. Celle-ci doit être un lieu d’échanges entre tous ceux qui concourent à son fonctionnement. Les salariés doivent gérer davantage les affaires économiques, qui sont leurs affaires après tout ; ils doivent être associés à toutes les décisions qui concernent la vie et le développement de leur entreprise : il y va de la démocratie économique.

De la même façon il nous semble essentiel de promouvoir une gestion citoyenne des dépenses publiques et d’associer autant que faire se peut l’épargne individuelle et le progrès social (construction d’HLM, prêt au PME en difficultés, développement des services publics…)

La participation concerne aussi l’école. L’association des élèves à l’organisation et à la vie de l’école est capitale. L’élève qui participe se trouve beaucoup plus motivé, et donc impliqué, que l’élève passif, à qui l’on ne reconnaît aucun droit d’initiative. Il appartient aux enseignants d’éveiller chez leurs élèves le goût des responsabilités et le désir d’en assumer. Ne l’oublions pas : le meilleur apprentissage de la citoyenneté est son exercice effectif.

Chaque citoyen en somme doit avoir la possibilité de peser sur les décisions prises dans la société.

LE COMBAT POUR UNE MONDIALISATION SOLIDAIRE ET PACIFIQUE

La France, et la France dans l’Europe, doit redonner à notre République ses couleurs universelles : celles de ses traditions intrenationalistes, solidaires, et pacifistes. Dans un monde où le capitalisme et les puissances d’argent sont principalement à l’origine de nouvelles et graves inégalités. Un monde où l’expression de la pauvreté, les tensions et les conflits réels ou potentiels sont dangereux ; la France et sa diplomatie doivent prendre une place exemplaire dans tous les combats libérateurs des peuples, en faveur de la démocratie, de la coopération et de la paix.

D’abord l’Europe, c’est d’abord là que ces choix doivent s’opérer. La France ne doit pas se replier mais contribuer à une construction se dégageant de la construction actuelle, celle des marchés qui sont à l’origine de la crise actuelle du capitalisme et de son système. L’Europe de l’avenir, celle des peuples et des nations qui souhaitent se confédérer doit prendre en compte les inégalités de développement des pays qui s’unissent en son sein. C’est une autre Europe qu’il faut construire, avec les citoyens. Une europe de l’harmonie sociale par le haut, celle du progrès social et humain, libérée des diktats imposés par les marchés.

Pour le multilatéralisme, c’est dans ce sens que la France et l’Europe doivent être au premier plan en faveur d’un multilatéralisme qui prenne en compte les évolutions du monde et, notamment, la réalité des pays émergents. L’ONU doit être valorisée, réformée et modernisée. Son rôle renforcé afin de résister à ceux qui sont parfois tentés de faire de l’oraganisation internationale un  » instrument des stratégies d’ingérence et/ou de blocage des grandes puissances « . Alors que la planète est confrontée à d’immenses défis climatiques, migratoires aus conséquences alimantaires et sanitaires d’extrême garvité, la France et l’Europe doivent agir pour que l’ONU se dote de nouveaux outils lui permettant de mieux garantir, face à l’hégémonie des marchés, les droits humains, sociaux et environnementaux.

Une nouvelle stratégie de coopération est à réfléchir. La France doit s’engager dans des coopérations mutuellement avantageuses, solidaires et respectueuses de la souveraineté des peuples. Notre pays doit être porteur d’une nouvelle stratégie de coopération avec les pays les plus pauvres et notamment ceux des pays de l’Afrique subsaharienne. La France peut être, avec la Méditerranée, un trait d’union entre l’Europe et L’Afrique et faire d’une nouvelle politique de coopération un axe prioritaire de développement constitutif d’un pôle Europe-Afrique du monde multipolaire. Pour répondre aux besoins mutuels et à l’avenir des deux continents au coeur d’une mondialisation solidaire. Ce nouveau type de coopération rompra avec les pratiques néo-coloniales et les soubresauts de trop fameuse « France-Afrique ».

Dès à présent, l’aide publique au développement doit être revue. L’image internationaliste et généreuse gagnerait à une stratégie de rattrapage et de revisite de son engagement financier d’aide publique au développement. Dans cet esprit, il s’agit de rattrapper en quatre exercices budgétaires les retards pris en ce domaine par la France et de tenir les engagements du Millénaire : 0,7 % du RNB en 2015. Un effort de 1,7 millird d’euros par an est nécessaire. Son financement pourra être assuré par le produit de la  » taxe sur les transactions financières « , des financements innovants et une économie sur les dépenses militaires.

Une France dans une Europe solidaire et pacifique. Alors que la crise financière se traduit dans les pays d’inspiration conservatrice et libérale par une austérité renforcée et de nouvelles inégalités, les dépenses militaires sur notre planète s’élèvent annuellement à 1600 milliards de dollars ; 40 milliards d’euros pour la France. Cette fuite en avant est gravissime. La France peut être à l’initiative – sur son propre budget – d’une baisse des dépenses militaires. Ce qui – contrairement aux affirmations répétées – ne serait pas de nature à affaiblir la capacité et la crédibilité de notre défense nationale et moins encore la sécurité du pays. La réduction pluriannuelle maitrisée de ce type de dépenses publiques dégagerait des moyens en faveur des dépenses sociales et d’investissements industriels civils (en premier lieu dans les industries concernées). Cette réduction pourrait progressivement correspondre à plus de 10 % de la loi de programmation militaire prévue au livre blanc. Une réorganisation de la Défense française dans le cadre européen, à tout le moins de ses voisins immédiats : Allemagne, Espagne, Italie, Bénélux permettrait des économis significatives de dépenses militaires et permettraient de reconsidérer ce qu’ont été les raisons de la réintégration de la France dans le commandement intégré de l’OTAN.

Notre République doit être exemplaire en matière d’initiative pour la paix, le désarmement et la stabilité. La France pour rester fidèle à sa conception universalite et multilatéraliste doit se retirer du commandement intégré de l’OTAN. Dès la fin de 2012, elle doit retirer ses troupes d’Afghanistan. Nous avons évoqué le nécessaire renouveau de l’ONU : la France comme membre permanent du Conseil permanent de sécurité doit conserver son droit de véto et y agir pour promouvoir en son sein la présence de pays émergents notamment d’Afrique et d’Amérique latine. Pour y faire en sorte que le respect de l’application des résolutions de l’ONU devienne enfin un principe intangible. La république française, comme elle l’a fait à l’UNESCO, reconnaîtra l’Etat de Palestine en veillant au droit de l’Etat d’Israël à vivre en sécurité

LA RECONSTRUCTION SOCIALE AUTOUR DES PRINCIPES DE JUSTICE SOCIALE, D’EGALITE, D’ACCES AUX SAVOIRS ET A LA CULTURE

La financiarisation capitaliste représente un danger pour l’ordre économique. La France compte aujourd’hui environ huit millions de pauvres et plus de 800 000 sans-abri, soit 13 % de la population (rappelons qu’un foyer est considéré comme pauvre s’il ne dispose que de 949 euros mensuels pour vivre). Cinquième puissance économique mondiale, notre pays a pourtant généré un PIB par habitant de près de 35 000 euros en 2009.

L’économique est donc primordial pour tous les progressistes. Emmanuel Mounier, fondateur du personnalisme moderne, avait cette très belle phrase : « Ne méprisent généralement l’économique, écrivait-il, que ceux qu’a cessé de harceler la névrose du pain quotidien. Un tour de banlieue, concluait-il, serait préférable, pour les convaincre, à des arguments ».

a) La lutte contre les inégalités économiques, pour une plus grande justice sociale

La société française est l’une des plus inégalitaires qui soient en Europe (alors qu’elle se situe au 3ème rang en termes de revenu annuel par habitant). Les 20 % des ménages les plus aisés disposent de 40 % du revenu national tandis que les 20 % les plus modestes n’en détiennent que 8 %. Pour dire les choses autrement, les 20 % de Français les plus riches détiennent 4 fois plus de richesses que les 20 % les plus pauvres, et les ménages les plus riches ont un niveau de vie 5 fois plus élevé que les plus pauvres. En 2010 plus de 80 milliards d’euros de bénéfices et 43 milliards d’euros de dividendes ont été versés par les entreprises du CAC 40. Par ailleurs, les présidents de ces entreprises ont gagné, en moyenne, la même année, 2,46 millions d’euros, soit une hausse de 24 % par rapport à l’année précédente, ou encore 308 années de SMIC. Ce sont actuellement les patrons les mieux payés d’Europe (les écarts pouvant atteindre jusqu’à 1 200 SMIC par an) [entre les salariés les moins payés et les dirigeants il y a parfois un rapport de 1 à 100, voire bien davantage.] Selon l’étude Proxinvest, pour l’année 2007, les PDG du CAC 40 ont en moyenne touché, en une seule journée, le traitement annuel d’un salarié payé au SMIC. Concluons en notant que le niveau de vie médian qui avait augmenté de 5 % par an en moyenne au cours de la période 1997-2001 n’augmente plus que de 1,6 % depuis 2002. Pour la majorité des foyers français, la fourchette des revenus se situe entre 10 000 et 40 000 euros annuels (chiffres 2008). La moitié des ménages doit aujourd’hui composer avec un budget de moins de 2 380 euros par mois (les 10 % les plus pauvres disposant de moins de 1 100 euros et les 10 % les plus riches d’environ 5 000 euros).

L’urgence est donc à une juste répartition des richesses. Cette inégalité s’est faite à coups de cadeaux fiscaux et de dons aux entreprises. Les 538 niches fiscales (réductions, exonérations et crédits d’impôts) et sociales (exonérations de cotisations sociales, taux réduits de CSG…) atteignent désormais la somme faramineuse de 104 milliards d’euros ! Les causes des déficits de la Sécurité sociale et du régime de retraite sont bel et bien à rechercher d’abord de ce côté ! Les « féodalités économiques et financières » assurent la « direction de l’économie » et la modèlent. Ce que le milliardaire Warren Buffet exprime en ces termes : « Il y a une guerre des classes, c’est un fait, mais c’est ma classe, la classe des riches, qui mène cette guerre, et nous sommes en train de la gagner ». Alors que le gouvernement parle de cancer gangrénant la France quand il évoque le RSA, ces chiffres montrent que les plus assistés dans ce pays sont les entreprises et plus particulièrement les grandes entreprises ainsi que les contribuables les plus aisés.

Ces niches sont d’autant plus blâmables que la plupart, selon la dernière étude de l’inspection générale des finances portant sur 339 niches fiscales et 46 niches sociales, sont, soit « peu efficientes » (47 %), soit purement et simplement « inefficaces » (19 %).

La société française compte donc parmi les plus violentes qui soient. La première des violences est économique, celle qui prend la forme du chômage et de la précarité pour les uns, du sur-enrichissement et des bonus pour les autres. Cette violence est celle de la loi du marché avide de profit et de rentabilité, où chacun travaille pour soi sans solidarité avec les autres. Il est temps de rappeler que tout métier ne peut avoir que des fins humaines.

Les progressistes n’acceptent donc pas la détérioration des conditions de travail qui existent dans nombre d’entreprises, ni le démantèlement des services publics (EDF, La Poste, Éducation nationale). A leurs yeux, le chômage, la pauvreté ne sont pas seulement des indicateurs statistiques, mais aussi et avant tout des vies de souffrance. Sans négliger l’insécurité physique (des biens et des personnes), la première insécurité n’est-elle pas économique et sociale ? Le marché de l’emploi est par ailleurs sans cesse fragilisé, et les situations professionnelles précarisées. L’utilisation des salariés comme « variable d’ajustement » d’une activité économique devient la règle.

La flexibilisation du travail est assurément un danger pour l’avenir socio-économique de notre pays puisqu’elle ignore totalement le besoin de stabilité et de sécurité des individus et renforce la violence que subissent les travailleurs. Accéder à l’emploi, jouir de la sécurité dans le parcours professionnel, bénéficier d’un logement décent, de soins de qualité doivent devenir une ambition commune à celles et ceux qui refusent la domination de l’économie sur le politique.

b) Une fiscalité juste, restaurant les équilibres sociaux et dynamisant l’économie réelle.

Ne pas y travailler serait rendre impossible toute possibilité de changement et de réponse à de nouvelles donnes sociales et économiques. Cette question ne peut pas seulement être débattue sous l’angle des maitrises des dépenses mais se doit de l’être aussi sous celui de recettes nouvelles. En ce sens, il apparaît judicieux d’établir le panorama des 20 années d’évolutions, le plus souvent inéquitables de la ressource publique et par delà induire celles des mesures les plus indispensables à l’aune de la justice sociale et de l’évolution économique.

Cet état des lieux montre que depuis 1994, la nature de l’impôt a changé même s’il demeure assis au ¾ sur les ménages, au ¼ sur les entreprises – pourtant à l’origine de la richesse créée. Depuis cette date, l’impôt « semble » avoir été davantage alimenté par les entreprises que par les ménages : or ces derniers ont vu les différentes taxations croître de 76 % tandis que celles des entreprises auraient, quant à elles, doublé.

Plus méthodiquement : concernant l’impôt sur le revenu mais aussi ceux du patrimoine et l’ISF, sans parler de l’élimination des plus hautes tranches, la pression fiscale sur les ménages s’est accrue de 15 milliards d’euros, via la fiscalité locale pour 5 milliards et la TVA et autres impôts de consommation pour le reste.

Il est aussi important de rappeler que le fléchissement du développement des revenus en particulier salariaux (moins 50 à 60 % sur les dernières décennies, selon les sphères économiques) serait de nature à desserrer la pression fiscale et … serait à l’origine de la croissance des ressources de l’Etat au travers d’un impôt rénové. On accrédite ainsi l’idée qu’un point de PIB (20 milliards) enclencherait 3 à 4 milliards de ressources nouvelles.

Ceci ouvre le chantier de la répartition entre les possibilités de recettes et les niveaux de dépenses nécessaires et oblige à un nouvel équilibrage du partage des richesses afin d’espérer retrouver un sens à la justice sociale.

Cette « réforme » des fiscalités économiques, territoriales et des revenus devrait être fondée sur un principe simple mais apparaissant plus démocratique et faisant sens au regard du principe de capacité contributive des entreprises et des citoyens.

Concernant la contribution fiscale des entreprises, ce serait une erreur de rester sur les schémas de feu la taxe professionnelle rapportant 37 milliards et d’ignorer les 12 milliards déjà dégrevés en 2009, comme il serait inopportun d’omettre les conséquences des précédentes réformes touchant aux revenus de la TP qui auront dispensé, en un peu plus d’une décennie, le paiement par les entreprises de près de 10 milliards d’euros de contribution « territorialisable », un montant proche de celui de la pression fiscale supplémentaire demandé par les collectivités à leurs habitants depuis 1994.

En outre, on ne peut occulter la situation révélée par le Conseil des Prélèvements Obligatoires lequel évoque un impôt sur les sociétés concentré sur les grandes entreprises et un taux implicite trois fois moindre que celui des PME.

Les données du CPO sur la ventilation des paiements d’IS selon la taille des entreprises sont tout autant révélatrices que désastreuses tant pour notre économie que pour une justice fiscale, ne serait elle qu’à minima. En effet, l’examen de cette situation aboutit à exclure un gisement fiscal de 40 milliards d’euros et transgresse la règle d’équité fiscale au seul profit des entreprises de plus de 2000 salariés.

Cela passe par une refonte totale de la fiscalité économique en sachant que le niveau d’imposition de 33 % relève aujourd’hui du leurre et serait au final en dessous de 10 % : il est maintenant temps de rompre avec le défaut originel d’une fiscalité économique ne faisant pas la distinction de l’impact économique d’une entreprise selon que celle-ci soit un grand groupe, une TPE ou une PME-PMI.

Cette situation au regard du dynamisme et de l’encouragement économique interpelle sur les principes fiscaux novateurs autour d’une fiscalité d’entreprise liée à la fois au développement de l’emploi, de l’investissement et des déploiements du crédit bancaire.

Le principe même de la progressivité de l’impôt sur les sociétés est à ouvrir dès lors où celui-ci est conditionné :

à la préférence des fonds propres sur les dividendes
à l’utilisation de ceux-ci vers l’investissement et l’emploi
à une taxation non des bénéfices… mais de leur distribution
à l’existence d’un impôt « désintoxiquant/confiscatoire » sur les pratiques

Outre le fait que l’incitation à la constitution de fonds propres soit de nature à provoquer un effet de levier de financement quasi public, cette situation assurerait de l’existence de disponibilités bancaires vouées, en rupture avec les pratiques actuelles, au financement des fonds de roulement, zone souvent de fragilisation des TPE et PME.

La proposition d’une fiscalité progressive en fonction du volume des bénéfices non investis pourrait se graduer sur une échelle de taux de 5 à 50 % et possiblement provoquer un rendement fiscal de l’ordre de 10 milliards d’euros.

L’idée d’une imposition progressive basée sur la réalité de leurs capacités contributives et pouvant aller de 5 à 50 % pourrait être retenue : ce sont là 80 milliards d’euros de recettes possible.

Les ressources territoriales doivent être garanties. La réforme de la taxe professionnelle, sous tendue par de bonnes questions, a mené vers de mauvaises réponses et à une « nasse financière » non vertueuse. Préalablement à la réforme coexistaient deux problématiques tenant à l’inégalité de traitement des territoires et à l’inégalité de traitement fiscal des entreprises, et avait été mis en place un dispositif abusivement appelé de péréquation sans que l’Etat n’intervienne, dispositif régi selon le principe d’enveloppe constante. Le tout étant phagocyté par le principe de liaison de taux qui déresponsabilise les élus locaux et empêche toute possibilité d’intervention sur la part « valeur ajoutée » désormais consacrée dans la loi.

La phase où la taxe économique autorisait une capacité d’initiative et d’intervention autour de l’aménagement du territoire en actionnant à la fois les leviers fonciers, manufacturiers et de l’emploi serait révolue et l’on favoriserait exclusivement le critère « emploi » via l’index valeur ajoutée/poste de travail en reléguant les activités industrielles au second plan et au profit d’un développement uniquement capitalistique. Une telle démarche incitant les collectivités à n’accueillir que des sièges sociaux ou des hypermarchés et au-delà s’inscrire dans une démarche concurrentielle.

La base valeur ajoutée ne peut être rejetée. Cependant, celle relative à la capacité des élus à promouvoir leurs territoires, les atouts locaux de formations, de compétence professionnelle des populations, les solidarités, doit être revalorisée et promotionnée.

La question des besoins différenciés des collectivités demeure et s’accroît devant l’insatisfaction de l’outil fiscal actuel. Ainsi, la piste d’une contribution économique rénovée liée à la valeur ajoutée et ramenant le niveau de la fiscalité locale à hauteur de 10 milliards, répartie, partiellement ou totalement, en fonction de critères « péréqués » et sous une autorité du type « comité des finances locales », devrait être envisagée et décidée. Le fléchage différencié des recettes nouvelles, assurant dans un 1er temps, le maintien des ressources actuelles à toutes et permettant une discrimination positive pour certaines.

La fiscalité locale se devrait de reposer sur un principe nouveau : une contribution économique territoriale. Il s’agirait de ne pas mettre sous l’autel des pertes et profits les revenus de la taxe professionnelle mais de la traduire en un impôt des entreprises plus juste tenant compte de la taille de l’entreprise, du nombre d’emplois, de ses capacités financières et de le faire en sortant de l’égoïsme que pouvait induire une fiscalité très locale. L’instauration de ce nouveau système de péréquation territoriale serait susceptible de rapporter 5 à 10 milliards d’euros en sortant du défaut d’une TP ne tenant pas compte des capacités contributives des entreprises qui en faisait un impôt injuste.

c) Une défense énergique des droits économiques de la jeunesse et des seniors

Les jeunes sont mal traités en France ! Comment en douter lorsque l’on sait que le taux de chômage (22-23% de la génération) est l’un des plus élevés d’Europe, derrière celui de l’Espagne (45 %). Ce sur-chômage ou hyper- chômage ne manque pas d’intriguer par sa constance depuis quatre décennies.

Pour l’employeur, les raisons seraient dues aux inadéquations de l’orientation scolaire, au manque de mobilisation, à l’appréhension vis-à-vis de certaines activités et au fameux « manque d’expérience ». Pourtant il ne suffira pas de combler ces manquements pour que les jeunes bien diplômés, bien formés ou en échec scolaire trouvent un emploi. Car les diplômés, et même parfois les titulaires de prestigieux diplômes, ne sont pas totalement à l’abri du risque de l’inactivité. Le parapluie diplômant est fragile et la volonté d’institutionnalisation de la précarité reste le facteur déterminant d’une situation insupportable. L’accès au travail continue de varier selon le niveau d’études mais les insuffisances propres à certains jeunes ne permettent plus d’expliquer à elles seules la situation actuelle. C’est aujourd’hui l’insertion professionnelle de toute une génération qui est en cause.

Des arguments économiques sont aussi invoqués pour expliquer le sur-chômage des jeunes. Le manque d’emplois en particulier ? C’est partiellement exact, mais cette carence n’explique pas un taux de chômage des adultes deux fois inférieur à celui des jeunes et ne saurait faire oublier que si les entreprises remplissaient, dans le passé, un rôle important d’insertion dans la société, elles demandent aujourd’hui à ce que le jeune soit exclusivement et immédiatement un salarié productif au demeurant moins payé qu’un autre.

Beaucoup évoquent quand ils parlent de la jeunesse une « génération sacrifiée » pour rendre compte d’une génération en mal d’avenir. Il est sans nul doute nécessaire que les questions de la jeunesse imprègnent de manière transversale les politiques futures d’un gouvernement de gauche.

d) Un réel et équitable accès aux savoirs et à la culture, aux soins et au logement

Les familles ne sont pas égales dans leur capacité à doter leurs enfants des outils d’expression et de communication nécessaires à la réussite de leur scolarité. Le capital économique, social et culturel de chacune détermine, pour partie, la réussite scolaire d’un enfant. L’on doit par conséquent donner tous les moyens et tous les outils aux enfants les plus démunis afin de favoriser leur réussite. De la maternelle à l’université les besoins budgétaires, pédagogiques et démocratiques sont de plus en plus criants.

Un égal accès à la culture doit être défini. La culture est en effet quelque chose qui se partage. Mais l’on ne saurait se contenter de promouvoir LA Culture institutionnelle. La culture, c’est aussi la culture familiale, la culture de proximité, celle des villages et des quartiers. Nous devons valoriser, à travers des évènements d’importance, la qualité de la culture de chacun.

Un travail quotidien est déjà fait en ce sens par les acteurs du champ socio-culturel. Il doit être renforcé par une impulsion nationale de façon à en garantir la vivacité. Ainsi, par exemple, les Universités populaires, de partage du Savoir…. doivent-elles se voir renforcer et la participation à leur fonctionnement valorisé. Le M.U.P, qui porte le désir d’une société plus solidaire, plus participative, plus citoyenne, entend que les outils permettant la réalisation de ce désir soient mis en place.

Refonder l’école. Il nous faut refonder l’école et, en urgence, lutter contre toutes les ségrégations qu’elle produit, comme être d’un « mauvais lieu », être issu d’une famille « étrangère ».

Notre système éducatif est en crise : crise de moyens, humains et pédagogiques, crise de sens. Si les élèves manquent de professeurs pour être bien enseignés, de surveillants pour être en confiance, ils manquent aussi de clarté dans les finalités de l’école.

Ainsi l’Etat devra-t-il poursuivre simultanément deux objectifs :

1 / « réparer » une conjoncture fortement dégradée, ce qu’il fera, non seulement par le recrutement d’enseignants auxquels il redonnera une formation digne de ce nom, mais par l’engagement d’infirmières scolaires, de médecins.

2 / diversifier les pédagogies en les personnalisant, tenant compte des différences de rythmes des élèves dans leurs apprentissages, en développant par ailleurs le travail d’équipe et la coopération scolaire, ce qui implique, dans un premier temps, la suppression des notes pour les élèves du primaire et les élèves de 6 è et de 5è.

S’il faut ré-interroger les moyens et les programmes de l’Education nationale, mettre en place une pédagogie qui valorise la réussite individuelle, il faut aussi ré-interroger les valeurs de notre Ecole. Une société juste et solidaire ne peut se bâtir durablement si elle ne promeut pas dans son système éducatif des valeurs humanistes. La réouverture des postes supprimés et la formation des professeurs ne peuvent produire des effets positifs que si nous acceptons une refondation de l’Education nationale autours de valeurs de solidarité républicaine et citoyenne.

Prendre mieux en charge la petite enfance et les personnes âgées. La première des injustices vis à vis de l’enfant se joue dans l’accès à des modes de garde de qualité. Notre système d’accueil du jeune enfant est aujourd’hui très insuffisant et n’est pas de qualité. Aujourd’hui, plus d’un million d’enfants entre 0 et 3 ans sont privés d’un mode de garde épanouissant. L’accueil en crèche ou auprès d’une auxiliaire de puériculture, on le sait, est le premier rapport quotidien de l’enfant à l’altérité. L’éducation des tous petits doit donc être délivrée par du personnel formé. La petite enfance est un domaine où une société qui croit en son avenir doit investir. Il n’est pas acceptable que l’Etat désinvestisse cette partie de la vie.

On ne peut plus accepter que les femmes soient condamnées, soit à rester à la maison pour s’occuper de leur enfant, soit à exercer leur profession. Elles doivent pouvoir faire un choix réel. La crèche collective plébiscitée par les parents est un lieu d’apprentissage, où l’enfant découvre son premier rapport aux autres. Il ne peut y avoir de plein emploi, de salariés disponibles et épanouis dans leur travail sans des modes de garde structurants et épanouissants pour les tous petits. Certes, les entreprises font parfois le choix de créer des crèches pour leurs salariés. Ce n’est pas satisfaisant. Des moyens doivent donc être dégagés pour créer un vrai « service public de la petite enfance », qui serait en partie financé par une cotisation employeur. L’enfant entre 0 et 3 ans est une personne et durant ces trois ans sa capacité d’apprentissage est sans limites.

Le vieillissement inéluctable de la population doit nous conduire pareillement à innover. Il faut ainsi repenser l’habitat en créant les conditions d’un véritable maintien à domicile, dans des conditions de sécurité maximale. Les progrès considérables de la robotique peuvent nous y aider. Mais ce sera insuffisant. La présence humaine est indispensable. Le maintien à domicile des personnes en perte d’autonomie est un gisement d’emplois qualifiés pour le futur. La création d’un 5ème risque qui permette la prise en charge de la perte d’autonomie le plus longtemps à domicile, ne laissant pas les différences de territoires générées par l’APA est l’un des dispositifs prioritaires à mettre en place pour faire face au défi du vieillissement.

L’investissement dans l’éducation est une priorité pour donner un véritable « droit d’avenir » à la jeunesse de ce pays. Sa formation détermine sa réussite sociale et professionnelle. Il est temps par conséquent de mettre fin à cette « méritocratie » scolaire libérale qui n’est pas plus respectable que la « méritocratie » professionnelle. N’oublions pas à ce sujet les limites de l’« ouverture sociale » pratiquée par l’école de Jules Ferry. Les républicains du XIXème siècle, loin de faire preuve d’esprit égalitaire, n’avaient en vue que de permettre à quelques enfants méritants du peuple de prolonger quelque peu leurs années d’enseignement… pour venir ensuite grossir l’élite dirigeante.

C’est bien de la réussite pour tous qu’il s’agit pour les progressistes, d’une révolution des pratiques et des méthodes de transmission des connaissances et des compétences, de la mise en responsabilité des élèves au sein des établissements scolaires et d’un meilleur échange entre les différents acteurs de la communauté éducative.

Mais la réussite éducative ne peut se poser au regard de la seule école de la République : les familles sont également concernées. Une politique sociale de l’éducation ne peut se construire qu’en partenariat avec les premiers éducateurs des enfants : leur famille. Il semble donc plus que jamais nécessaire de restaurer les parents dans leurs compétences. Le discours décrivant les familles d’enfants en difficultés comme incompétentes ou démissionnaires n’est pas acceptable.

L’accompagnement de la scolarité d’un enfant procure aux parents un second temps de rencontre avec le savoir dispensé par l’école. Cette nouvelle rencontre offre l’opportunité de construire une société où chaque citoyen a une meilleure connaissance culturelle. La réduction des inégalités d’accès au savoir est un axe de travail essentiel. La culture jouant sans aucun doute un rôle d’émancipation de l’individu, une société humaniste ne saurait se construire en l’absence de projet fort en ce sens.

La définition d’un véritable droit au logement est nécessaire. La crise que nous traversons est équivalente à bien des égards à celle des années 1950 après la guerre. La défiscalisation « Scellier » est totalement inefficace : il faut un plan de construction, pénalisant de toutes les aides publiques, les maires qui n’appliquent pas la loi SRU (20 % de logements sociaux). C’est par ailleurs un plan de plusieurs milliers de logements pour les catégories les plus modestes qui doit être mis en route afin de desserrer l’étau de la mobilité dans le parc existant. Il faut injecter des fonds dans la construction de logements sociaux et d’accession sociale, à coût maitrisé, pour favoriser le parcours résidentiel…Et faire un effort tout particulier en direction des populations jeunes et âgées.

LA DEFENSE DES LIBERTES INDIVIDUELLES ET COLLECTIVES

Les Français assistent, impuissants ou résignés, au déclin des libertés fondamentales, individuelles et collectives. La crise de la société française est aussi une crise des libertés. Un système de lois répressives, certaines camouflées sous l’appellation de « mesures de prévention » (couvre-feu, vidéo-surveillance), menace en permanence notre démocratie et nos droits les plus essentiels. Les citoyens doivent être protégés contre les abus de tous les pouvoirs car, comme le rappelle Alain, « l’abus de pouvoir est un fruit naturel du pouvoir ». Police, justice et prisons doivent donc être réorganisées de manière à mieux protéger les droits des citoyens.

La confiance qui doit lier la police aux citoyens, résultant de sa mission de les protéger, a été mise à mal par la politique sécuritaire menée par les gouvernements conservateurs. La possibilité offerte aux forces de l’ordre de recourir à l’usage d’armes dites « non létales » contribue à cette dilution de la confiance que la population accorde aux policiers. Depuis 2005, 7 personnes ont perdu la vue du fait de l’usage de flash-ball lors de manifestations.

a) Pour une nouvelle politique de sécurité

Chaque citoyen, chaque groupe ou mouvement de citoyens, est en droit de participer au débat sur la sécurité, tout à fait légitime au regard de l’intensité et de la gravité des violences urbaines actuelles. Il n’est plus temps, en effet, de se demander si le problème de l’insécurité sera résolu par la répression ou par la prévention. L’une et l’autre, même conjuguées, ont globalement failli. La répression plus que la prévention, malgré tout. Combien de temps faudra-t-il redire que la répression – qui n’est que colère, disait Nietzsche – n’a jamais résolu aucun problème social ? Qu’elle ne suffit même pas à calmer et rassurer l’opinion publique ? Quant à la prévention (qui est déjà une punition : ne stigmatise-t-elle pas a priori certaines catégories de population ?), même fondée sur le partenariat des élus locaux et des acteurs de terrain sous la forme fréquente des contrats locaux de sécurité, ne montre-t-elle pas aujourd’hui toutes ses limites dans le traitement de la violence ? Utile, ce partenariat, qui devrait aussi inclure les associations de jeunes, n’est désormais plus suffisant.

Il n’est de prévention réelle que générale et sociale :

Prévention par l’école, recentrée autour des valeurs de réussite pour chacun et d’une pédagogie nouvelle, seul moyen de limiter le décrochage scolaire et de participer à l’émergence d’une morale démocratique chez les enfants

Prévention par l’insertion : les Missions Locales et les dispositifs d’insertion pour la jeunesse manquent d’outils permettant à leur public de cheminer vers une insertion durable. En donnant les moyens d’un accompagnement individualisé, nous nous assurerons que les personnes les plus désocialisées seront réellement prises en charge et soutenues. En créant des dispositifs d’insertion et de réinsertion articulés et validant des « unités de compétence » que l’individu pourra valoriser professionnellement, nous assurerons à ces personnes des chemins clairs de retour vers l’emploi.

Prévention par un accompagnement à la parentalité. La question de l’éducation des enfants doit être un sujet de débat dès l’âge scolaire. Il s’agit, pour l’Education nationale, d’aborder la question du développement psycho-affectif de l’enfant ainsi que les différents courants pédagogiques.

Prévention par l’urbanisme. Au delà de l’action de l’Agence Nationale de Rénovation Urbaine une action de fond doit être menée dans les quartiers urbains qui ne disposent ni d’équipements de services publics (postes, CAF…) ni d’équipements culturels (salle de spectacle…) et qui sont peu investis par les entreprises (restauration, alimentation, prêt à porter…). Les équipements culturels implantés dans les cités auront vocation à faire entrer du tiers et à créer du mouvement dans la cité pour éviter le cloisonnement et la paupérisation des populations.

Sachant que le « noyau dur » du problème se situe dans les relations épouvantables entre la jeunesse et les forces de l’ordre, nous proposons d’instaurer un « cessez-le-feu ». Que chacun des adversaires dépose les armes, jeunes d’un côté, policiers de l’autre (ces derniers, rappelons-le, ne sont de toute façon autorisés à user de leurs armes qu’en cas de légitime défense ou pour se protéger). Que l’État s’engage avec les forces économiques à examiner le cas de chaque jeune et à lui assurer une autonomie sociale. Ensuite, il sera temps d’ouvrir un « Grenelle de la sécurité et de la tranquillité publique ».

Cette étape de réflexion est importante, elle doit permettre, sans préjugé, d’abord de reconnaître les raisons objectives et subjectives de cette violence, qui mine profondément notre société. Un tissu social dégradé, une conjoncture économique marquée par un chômage de masse, une précarité banalisée, un mal-logement persistant, sont facteurs de violence et de souffrance (celle-ci, on l’oublie trop, générant souvent celle-là). Ces situations objectives doivent être combattues encore et encore, avec obstination : il y va de la paix sociale ! De la même façon, il nous semble urgent de lutter résolument contre les raisons subjectives qui président aux violences dans la ville. Celles-ci s’appellent « manque de considération sociale », « manque de respect », sentiment d’inutilité sociale ou d’abandon personnel, « manque de citoyenneté » en somme. Il s’agit de redonner de la dignité à ces jeunes mal-aimés qui sont aussi les plus démunis, scolairement, professionnellement.

Mais il faut aussi reconsidérer les missions et moyens des forces de l’ordre, et cela dans le propre intérêt de ces forces, car ceux-ci sont notoirement insuffisants. 9 000 policiers et gendarmes en moins en trois ans (et ce n’est qu’un début), c’est une aberration ! C’est la porte ouverte au développement effréné des polices municipales et des polices privées ainsi que des systèmes de vidéosurveillance (dont l’inefficacité est démontrée par toutes les études). La sécurité nationale doit rester du ressort d’une police d’État, les autres polices n’ayant vocation qu’à être des forces d’appoint, avec missions premières de protection et de secours.

S’agissant des missions de la police d’État, il n’est pas souhaitable qu’elles se réduisent à la répression et à l’investigation, comme le suggèrent les conservateurs. La raison d’être de cette police, comme de toute police d’un État de droit, est l’assistance et la sécurisation des citoyens. C’est la communication au quotidien, l’immersion paisible dans le tissu urbain (et rural), qui doit prévaloir. Il faut donc ré-instituer, sans plus attendre, la « police de proximité » mise en place par la gauche plurielle en 1997, en faire aussi davantage une « police sociale » de dialogue et de protection. Tel n’était pas le sens des ex-Unités territoriales de Quartier, mises en place par la droite, qui n’étaient qu’un quadrillage répressif, une surveillance au quotidien.

Police nationale et locales de proximité d’un côté, police de maintien de l’ordre et d’investigation de l’autre. Voilà les deux polices dont notre pays a besoin, sans confusion des genres.

b) Pour une Justice plus juste et mieux protectrice des libertés

Les libertés individuelles et collectives ne sont jamais définitivement acquises, elles ne subsistent qu’au prix d’une inlassable vigilance et d’un acharnement à les défendre. Or, nous assistons trop souvent, impuissants ou résignés, au déclin de ces libertés. Nous devons en prendre conscience : la crise de la société française est aussi une « crise des libertés ». A cet égard, la Justice doit faire l’objet d’une réforme radicale. L’autorité judiciaire doit retrouver davantage son rôle de « gardienne des libertés individuelles », en garantissant son indépendance et son efficacité.

En amont de la chaîne judiciaire, la garde à vue pose problème. Il faut savoir que, sous l’ère de M. Sarkozy, entre 2002 et 2009, les gardes à vue ont augmenté de près de 72 %. L’on ne peut donc que se réjouir de la décision de la Cour de cassation rendant obligatoire la présence de l’avocat tout au long de cette mesure, et ce, bien sûr, dès la première heure de détention. Conséquence : en un an (août 2010- août 2011), le nombre de ces mesures policières a baissé de 26 % (et même 50 % pour les délits routiers), sans que le taux d’élucidation des affaires ne soit sensiblement modifié (il n’a baissé que de 1,5 point).

Mais il faut évidemment aujourd’hui aller plus loin. Dans un premier temps, l’objectif est de diviser par deux le nombre de gardes à vue (dont on sait qu’elles ont atteint les presque 800 000 en 2009) d’ici à fin 2012. L’important, à terme, est de faire de cette mesure privative de liberté une mesure tout-à-fait exceptionnelle, avant d’envisager, pourquoi pas, sa suppression.

Pourquoi vouloir réduire ainsi le champ de la garde à vue, voire envisager sa disparition (il y a plus de trente ans, les forces de gauche – communistes en tête – réclamaient cette suppression) ? Bien entendu, rappelons, en préalable, que, là où elle sera éliminée (c’est-à-dire, dans la majorité des affaires), la garde à vue ne devra être remplacée par rien d’autre qui y ressemblerait de près ou de loin. Sur le fond, ce ne sont pas seulement les conditions de cette garde à vue « à la française » qui posent problème, mais son existence même. La garde à vue, le professeur Vedel l’a jadis souligné, est une atteinte gravissime aux Droits de l’Homme, une entrave majeure à la liberté d’aller et de venir, premier droit du citoyen. Qu’un avocat accompagne aujourd’hui le gardé à vue durant les interrogatoires policiers est donc, ne serait-ce que pour respecter le droit européen, le moins que l’on puisse faire. Mais, encore une fois, c’est insuffisant.

Pourquoi ? Tous les gardés à vue évoquent une épreuve psychologique terrible. Et que dire de l’insalubrité, de la saleté répugnante de la plupart des locaux d’« accueil » des personnes détenues ? Sans aucun doute, la garde à vue est une mesure indéfendable, et plus encore dans un régime qui se veut démocratique et soucieux de la dignité humaine. Elle l’est encore parce qu’elle ne bénéficie pas des réelles garanties judiciaires qui accompagnent en principe l’exercice de pouvoirs administratifs susceptibles de léser les libertés individuelles. Il y a bien sûr un magistrat décideur : le procureur de la République, mais outre le fait que ce magistrat agit sous l’autorité du Garde des Sceaux – ce qui fait toujours douter de sa totale indépendance, et donc de sa qualité d’« autorité judiciaire » –, il faut souligner que, dans nombre d’affaires, au moins celles de faible gravité (ou supposées telles), faute de temps pour examiner chaque dossier, il « couvre », ou, pour dire les chose moins sèchement, confirme les décisions déjà prises en amont par les services de police ou de gendarmerie. Ce qui fait de la garde à vue, à cet égard, d’abord une expression du pouvoir policier.

Il faut donc – et le plus tôt sera le mieux – limiter cette mesure et ne la conserver, faute de mieux, que pour les flagrants délits et les crimes d’une particulière gravité. Dans les autres cas, inventons par exemple une « audition de témoignage » au domicile des personnes soupçonnées d’infractions délictuelles.

S’agissant des mineurs, il faut, dans l’esprit de l’ordonnance de 1945, privilégier à nouveau sans réserve le traitement éducatif. Ceci implique en particulier de mettre fin au démantèlement de la Protection judiciaire de la jeunesse et de donner à cette institution les moyens nécessaires à sa mission. C’est pourquoi, alignant majorité civile et majorité pénale, nous proposons d’interdire toute incarcération des mineurs de 18 ans, sauf en matière criminelle. S’agissant du suivi des condamnés, des moyens nouveaux doivent être dégagés, notamment pour les services de probation.

CONCLUSION : POUR L’INSTAURATION D’UN NOUVEAU MODELE DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE, SOCIAL, ECOLOGIQUE ET PROGRESSISTE

Nombreux sont les progressistes, les républicains, les écologistes qui pensent aujourd’hui qu’une « autre façon de faire de la politique » est nécessaire. C’est aujourd’hui une urgence. Recoller aux réalités en est une autre. La démocratie politique doit être entièrement réorganisée sur une démocratie économique effective adaptée aux structures modernes de la production.

Les Français n’en peuvent plus de la politique de régression sociale et d’abaissement national du gouvernement en place. Ils veulent à présent des réponses concrètes à leurs problèmes quotidiens : une augmentation du pouvoir d’achat, la disparition de la distorsion entre les revenus insolents des plus riches et les maigres ressources des plus pauvres. Ils veulent un avenir pour les jeunes et un accès pour tous à un emploi durable dans un travail sécurisé. Ils veulent que le nécessaire développement économique s’accompagne d’une non-moins nécessaire émancipation individuelle et collective de l’homme. Qui n’a en mémoire ce fameux débat qui, au Parlement, en 1906, opposa Clémenceau à Jaurès. Au premier qui déclare : « C’est l’individu qui fait le milieu », le second répond : « Et c’est le milieu qui fait l’individu ». Seul ce dernier propos est progressiste. Jaurès disait que les révoltes instinctives étaient inutiles, et même stériles, si elles n’étaient guidées par une idée. Le progressisme est cette idée neuve qui, au nom des traditions humaniste et de la gauche populaire, place l’homme au centre de sa réflexion et de l’action politique.

Il n’y a plus de solutions « préfabriquées » : les succès incontestables obtenus par la civilisation matérielle (les « Trente Glorieuses » en France) ont pu faire croire que le bonheur surgirait, spontanément, pour tous, partout, dans un avenir proche. « Illusions du Progrès », disait Georges Sorel, auteur des Réflexions sur la violence, en 1906. La justice est et reste un combat politique. La justice et son grand dessein : la « Révolution de l’Homme », pour parler comme Edgar Morin. Cette révolution est permanente, c’est celle des rapports humains, incluant naturellement les rapports de production et les rapports de travail. Il faut en finir avec l’exploitation économique et l’esprit de domination.

Le nouveau progressisme ici défendu est ce que Péguy disait en son temps du socialisme : « C’est un système de justice, de vérité, de santé économique et sociale ». Ainsi l’économie et la politique devront-elles à l’avenir se subordonner à l’homme, et non l’inverse. L’une et l’autre devront donc se métamorphoser.

La France doit avoir confiance en son avenir. Elle dispose de toutes les ressources humaines et naturelles pour inventer un nouveau mode de développement qui assure les conditions matérielles indispensables à la dignité et à l’épanouissement de chacun de ses membres. Mais il faut restituer à la politique « une dimension visionnaire », sortir de cette fatalité qui voudrait que le capitalisme soit « l’horizon indépassable de l’humanité ».

La France doit avoir confiance en sa jeunesse : les 16 – 25 ans demeurent, on le sait, les citoyens les moins reconnus. Délaissés de la classe politique, délaissés des pouvoirs publics, oubliés des grandes réformes gouvernementales des 20 dernières années… C’est pourquoi, il nous apparait essentiel de donner aux jeunes la place qu’il leur revient de droit. Une place qui doit leur permettre de peser réellement sur les décisions politiques prises ou à prendre, une place qui fasse des jeunes des citoyens à part entière. Ainsi, le mouvement des Progressistes (mdP) a-t-il conscience qu’il ne saurait mener un combat efficace pour la transformation du paysage politique sans en appeler à la participation de la jeunesse. Nous ne souhaitons pas que celle-ci s’engage à nos côtés mais qu’elle s’engage avec nous, au sein même de notre structure. Nous ne souhaitons pas donner une place à part à la jeunesse, nous voulons qu’elle participe directement à la vie idéologique et politique de notre mouvement.

Le mdP souhaite à cet égard rompre avec cette tradition des partis qui consiste à créer à coter du « vrai parti », une petite organisation destinée aux jeunes. Nous souhaitons dépasser cette division entre « parti de la jeunesse » et « parti de l’age adulte ». Un mouvement politique ne peut se former durablement que s’il décide d’inclure directement les jeunes en son sein, parmi les instances de direction, dans ses réunions politiques. Nous ne voulons pas de « Jeunesse Progressiste », parce que cela reviendrait à faire de la jeunesse un jouet qui n’a pas sa place dans un mouvement politique en tant que tel. La jeunesse doit trouver sa place dans le jeu politique actuel, mettre ses qualités au service d’un mouvement unitaire, humaniste, de gauche. Le projet est donc clair pour les progressistes : l’élaboration commune, jeunes, adultes d’une alternative au néolibéralisme, la définition d’un programme de profonde transformation sociale. L’objectif : que ce projet puisse un jour prochain être porté au gouvernement. Il n’y aura pas de progrès humain possible sans le retour à un emploi pour chacun, un emploi sinon durable dans tous les cas du moins « sécurisé » : finis les « licenciements secs » sans reclassement préalable !

Le mouvement des Progressistes veut contribuer à la construction d’une société nouvelle, non capitaliste – y compris d’État –, fondée sur le progrès social, la préservation du potentiel humain et écologique de la planète, le développement de la recherche et de l’éducation, la démocratie politique et économique, la suppression de toutes les armes de destruction massive.