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Claude Pinon :  » Mélenchon est un populiste ! « 

La probable désignation de Jean-Luc Mélenchon comme candidat du Front de gauche pour la présidentielle de 2012, n’emballe guère le communiste Claude Pinon, secrétaire départemental du Mouvement unitaire progressiste (MUP). Et l’ancien conseiller régional s’interroge sur l’avenir de la gauche française…

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LA GAZETTE : Jean-Luc Mélenchon devrait être, sauf surprise, le candidat du Front de gauche. Est-ce une perspective qui vous comble d’aise ?
CLAUDE PINON : Non, pas vraiment. Mais de toute manière, les dés étaient pipés. On sait qu’il y aura plusieurs candidats – Mélenchon donc, André Gérin, le maire de Vénissieux, et André Chassaigne notamment – aux primaires. Mais quand Pierre Laurent, lors d’un conseil national du Parti communiste affirme qu’à titre personnel Mélenchon lui conviendrait, tout est dit…

Cela vous étonne ?
Non. Le vote est acquis pour Mélenchon aux primaires. Je connais bien la musique. J’ai l’impression qu’ils sont revenus en arrière : la direction a toujours raison, elle pense juste et bien, et ce choix va s’imposer. Et puis, Mélenchon passe bien à la télé…

Oui, surtout pour agresser les journalistes… Il va finir par se prendre une droite, un jour…
Moi, je serais journaliste, je pense que je lui en tirerais une s’il me parlait mal ! A-t-il besoin d’être grossier et agressif avec les journalistes ? On peut débattre et être incisif, mais lui, il va trop loin. Il fait du mauvais Marchais. Lui, au moins, respectait les journalistes, même lorsque le débat était musclé. Mélenchon, c’est l’impasse politique pour la gauche. Il va cristalliser les mécontentements et pourrait faire perdre le Parti socialiste. Mélenchon, sans aller jusqu’à le comparer à Marine Le Pen, est un populiste.

Cela vous gêne qu’il n’y ait pas de candidat estampillé Parti communiste ?
Non. Si c’est pour faire comme en 2007 avec Marie-George Buffet et ses 1,97 %…

Robert Hue, le président du MUP, pourrait-il se présenter dans un an ?
Je ne pense pas. Le MUP est un mouvement, pas un parti politique.

La gauche peut-elle gagner ces élections ?
Oui, à condition de ne pas faire n’importe quoi. Au MUP, nous militons pour que toute la gauche – y compris le NPA d’Olivier Besancenot – se réunisse et définisse les dix grands axes politiques pour redonner confiance aux électeurs. Et que toutes ces sensibilités de gauche soient représentées à l’Assemblée nationale. Pour 2012, ce souhait me semble difficilement réalisable. Mais pour plus tard, pourquoi pas ?

Si la gauche remporte cette élection, cela ne peut être envisageable que par le biais des socialistes. Or, les candidats aux primaires sont nombreux….
Je ne suis pas socialiste, et j’ai passé l’âge de le devenir. Mais j’observe tout de même avec intérêt ce qui se passe au PS. Des gens comme Manuel Valls ou Pierre Moscovici ont affirmé qu’ils retireraient leur candidature aux primaires si Dominique Strauss-Kahn se présentait. Mais que dit-on à propos de DSK ? Qu’il est le mieux placé pour battre Sarkozy. Et ce n’est pas suffisant. Il dit que la politique qu’il mène au FMI est de gauche. Personnellement, je ne suis pas convaincu. Je ne suis pas hostile, mais dubitatif.

Martine Aubry, alors ?
Ah non ! Elle incarne le vieux PS, l’appareil socialiste. Avec Martine Aubry, c’est presque le retour à la SFIO. Ségolène Royal, je n’y crois pas non plus.

François Hollande peut-être ?
C’est peut-être celui qui regarde le plus à gauche. Il est plus rassembleur que DSK. La gauche dans son ensemble le tolère plus. Il laisse moins sceptique que DSK.

Les socialistes ont rendu public un programme…
Oui, ou plutôt les grandes lignes, car le candidat – ou la candidate – socialiste pourra ne pas en tenir compte dans sa totalité. Il y a des choses intéressantes, au niveau social, mais cela ressemble tout de même à du replâtrage.

Et les écolos ?
C’est hasardeux chez eux aussi. Ils ont deux candidats principaux aux primaires : Éva Joly, qui est une vraie dogmatique et une écolo récente, et Nicolas Hulot. Lui non plus n’est pas un écolo de la première heure. Il sort de la télé, mais politiquement, on ne sait pas trop où il va. Et puis, lors des dernières cantonales, les écolos se sont maintenus au second tour, même quand il y avait un socialiste ou un communiste en face d’eux. C’est tout de même assez flou également chez eux… Je crains vraiment l’émiettement de la gauche.

Surtout qu’il ne faudrait pas enterrer Nicolas Sarkozy trop vite…
C’est vrai. La droite a une capacité de réaction qu’il ne faut pas sous-estimer. Cependant, je crois que pour Sarkozy, c’est fini. Il est en train de nous refaire le coup de 2007, en allant voir des ouvriers dans les Ardennes et en leur parlant de pouvoir d’achat. Mais les Français ne se laisseront pas enfumer deux fois. Mon sentiment profond, c’est que les amis de Sarkozy, quand ils connaîtront l’identité du candidat socialiste, vont lui faire comprendre qu’avec lui, la droite va droit dans le mur. La France a besoin d’un président, pas d’un saltimbanque.

Mais qui la droite enverrait-elle ?
Il y a des candidats plus ou moins déclarés, comme Alain Juppé, Jean-François Copé, ou encore François Fillon. Mais Sarkozy, non, ce n’est plus possible. Les Français ne veulent plus de lui. À cause de sa politique intérieure. Prenez l’exemple de la prime de 1000 €, qu’il semble vouloir. Mais il aura juste suffi que le Medef évoque son hostilité et déjà, ce projet a du plomb dans l’aile. Et sur le plan international, on navigue à vue. Sur la politique africaine, il y avait une certaine cohérence, sous De Gaulle, Mitterrand ou Chirac, même si des choses étaient discutables.

Vous critiquez l’engagement français en Libye ?
Je suis opposé aux interventions de ce type. Les frappes aériennes, visiblement, n’ont pas servi à grand-chose. Et puis, s’il fallait virer par les armes tous les dictateurs de la planète, il faudrait aussi frapper Moscou et Pékin !

Les choses semblent aussi s’agiter au centre…
Pour l’instant, ils sont trois : Hervé Morin, Jean-Louis Borloo, et François Bayrou. À mon avis, seul le dernier est certain d’y aller. Mais j’ai tout de même l’impression que pour un petit centre, cela fait beaucoup de candidats… Quant à Villepin, qui ne s’est pas encore déclaré, j’ai du mal à le classer parmi les centristes. C’est un gaulliste à la fibre sociale.

Le taux d’abstention constaté lors des dernières élections vous inquiète-t-il ?
Bien sûr. Cela traduit les doutes de nombreux Français, qui semblent ne plus croire aux partis traditionnels. Et surtout, le populisme irrigue les esprits. Les idées du Front national gagnent du terrain, y compris chez les gens de gauche. L’hypothèse d’un nouveau 21 avril, il faut la prendre très au sérieux. Elle est nettement plus forte qu’en 2007 .

Un article à retrouver sur www.gazette-cotedor.fr

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