Cultivons l’espoir plutôt que l’esprit de la contrainte et de la résignation.

laurentdumondPar Laurent Dumond, Membre de l’Exécutif national du MUP, Conseiller régional d’Ile-de-France.

En ce début de siècle, l’optimisme serait-il devenu une richesse ?  Si le précédent avait été celui des utopies et des rêves inassouvis, serions-nous aujourd’hui sous le joug du réalisme et des contraintes ?

Cependant, une réalité demeure. Les potentialités humaines, scientifiques et médicales permettant de répondre aux besoins les plus urgents sont aujourd’hui plus grandes qu’elles ne l’ont jamais été dans l’histoire. Elles se heurtent à des gâchis, des destructions et des inégalités insupportables qui mettent à mal une planète riche mais fragile. A travers le monde, cette contradiction est d’autant plus forte qu’elle s’accompagne d’une grande méfiance à l’égard de celles et ceux qui gouvernent.

En Europe, ce discrédit se traduit par un phénomène d’alternances politiques qui conduit à botter les fesses de la femme ou l’homme en place plutôt que de rechercher la construction d’autre chose. Les gouvernements de gauche comme de droite subissent cette réalité, l’Italie nous l’a récemment démontré en y rajoutant un cinglant rejet du représentant de la technostructure européenne.

La crise est passée par là mais la promotion par les dirigeants d’une culture de la contrainte et de l’effort érigée en dogme tend à effacer les différences idéologiques, à décrédibiliser les alternatives possibles et limiter de fait la capacité à élargir les champs du possible. Baisse des dépenses publiques, contrôle des déficits, recherche d’économies supplémentaires sont des leitmotivs assénés quotidiennement. Ils nous rappellent le célèbre « profits d’aujourd’hui faisant les emplois de demain » alpha et oméga d’alors de la réussite capitaliste et de la liberté d’entreprendre.

Ils suggèrent que les conséquences sociales deviendraient secondaires au vu de pseudo-priorités économiques. Cette référence persistante à la culture du résultat fait que le politique ne fait plus rêver, que le doute s’installe et que le partage des projets avec les citoyens est rendu plus difficile alors même que l’immense majorité de ceux-ci mesurent combien les difficultés sont réelles.

Promotionnée comme un espace de liberté, l’Europe est devenue pour beaucoup, et non sans raisons objectives, un carcan. L’Europe, cette grande et belle idée qui a si souvent servi aux politiques pour se dédouaner des conséquences des politiques qu’ils avaient initiées et qui, de ce fait, risque d’être massivement rejetée par ses peuples.

En France, le champ de l’impossible s’est refermé avec la défaite de Nicolas Sarkozy et celui du possible s’est ouvert avec l’élection d’un François Hollande porté par plus de 3 millions de citoyens participant aux primaires et par le discours fondateur du Bourget.

Après quelques mois d’exercice gouvernemental, celles et ceux qui souhaitent que cette expérience réussisse et soit durablement utile ont aujourd’hui besoin de ressentir que la nouvelle majorité travaille dans un même mouvement à des réponses concrètes liées aux urgences sociales et à la mise en place de réformes structurelles faites pour durer et changer.

Autant le dire, des doutes existent sur la manière dont le gouvernement lie ces deux exigences. Face aux difficultés, l’argumentation visant à expliquer que le Président devra être jugé sur et dans cinq ans inquiète plus qu’elle ne rassure celles et ceux qui vivent au quotidien les conséquences de la crise.

Le gouvernement ne peut donner le sentiment que le seul recours passe par faire mieux en ayant moins, par privilégier une approche reposant sur les seules économies et dépenses encore à réaliser sans rechercher de nouveaux ressorts de relance et de développement et de recettes réellement nouvelles.

Il n’est nul besoin de rajouter de la morosité à la morosité, les français savent ce qu’est l’effort. Ils savaient avant mai 2012 que la crise ne permettrait pas « les lendemains qui chantent » mais ils ont besoin de constater que de véritables bougés sont en cours afin de permettre, enfin, une plus juste redistribution des fruits des efforts consentis par tous.

Il a été expliqué aux populations du monde entier que la crise faisait voler tous les standards sociaux mais étonnamment les « règles » financières et les traités économiques internationaux demeurent immuables. On persiste à faire croire que la bonne gestion politique ressemblerait à la gestion du bon père de famille ne pouvant faire qu’avec ce qu’il a. Mais le jour où l’on annonce qu’une nouvelle réforme des retraites va être nécessaire, on apprend que les milliardaires sont de plus en plus milliardaires et plus nombreux.

Derrière cette simplification se cache la possibilité d’extension des populismes, des égoïsmes et des replis identitaires. C’est pourquoi la gauche gouvernementale se doit de rechercher de nouveaux moyens pour mettre en œuvre les réformes nécessaires. Des réformes qui ne pourront pas être supportées ou reportées par et sur les seules populations et collectivités locales et territoriales.

En ce sens,  des priorités seraient à décliner très vite afin de montrer la force et la volonté gouvernementale d’inventer des possibles et offrir de l’espoir.

Celle d’engager une profonde et nécessaire réforme fiscale est incontournable. Des mesures ont été prises mais l’approche d’une fiscalité  reposant, tant au niveau de l’impôt des entreprises que des ménages, sur les capacités contributives de chacun doit être réellement envisagée et engagée.

Celle de poursuivre et amplifier le chantier d’une véritable décentralisation pleinement assumée politiquement et financièrement parce que reposant sur une remise à plat des compétences dévolues à chacune et chacun.

Celle aussi de permettre au Président de la République de s’appuyer sur la représentation nationale et l’ensemble du pays pour que la France soit à même de redonner du sens à une Europe politique et institutionnelle dépassée et sourde aux préoccupations de ses peuples.

Celle, au-delà des mots, de redéfinir et revaloriser la notion de service public. Après des années d’austérité, de RGPP aveugle, les entreprises et administrations remplissant des missions de services publics continuent d’être sollicitées. La sanctuarisation de certaines d’entre elles laisse craindre le pire pour toutes les autres alors que l’efficacité publique est déjà largement entamée notamment du fait de l’abandon de tout ce qui permettait un lien social jugé inutile et onéreux. Pour la gauche la réponse à cette question est tout à la fois un atout mais aussi un enjeu.

Le Mouvement Unitaire Progressiste, dans une situation que chacun reconnaît difficile, se veut utile. Les progressistes que nous sommes ne veulent pas vendre du rêve mais contribuer à construire du possible. Ces quelques réflexions couchées sur le papier ne visent pas à autre chose qu’à contribuer à partager des pistes de rebond plutôt que celles d’une rigueur dont on sait qu’elle n’est vraiment pas la même pour tous dans un monde inégalitaire.

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