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Garde à vue : le compte n’est pas bon !

fize Si, en tant que citoyens, nous ne pouvons que nous réjouir de la décision, immédiatement applicable, de la Cour de cassation rendant obligatoire la présence de l’avocat tout le long de la garde à vue, et ce, bien sûr, dès la première heure, nous estimons très insuffisante ce que l’on nomme audacieusement « réforme de la garde à vue » : il faut évidement aller plus loin.

Dans un premier temps, nous suggérons de diviser par deux le nombre de gardes à vue (dont on sait qu’elles ont atteint presque les 800 000 en 2009) d’ici à fin 2012. Nous préconisons, dans un deuxième temps, d’en faire une mesure tout-à-fait exceptionnelle, avant d’envisager, pourquoi pas, sa suppression.

Pourquoi vouloir réduire le champ de la garde à vue, voire envisager sa disparition (il y a plus de trente ans, les forces de gauche – communistes en tête – réclamaient cette suppression) ?

Avant d’entrer dans l’argumentaire, nous posons comme préalable que la garde à vue, là où elle sera éliminée (c’est-à-dire dans la majorité des affaires) ne devra évidemment être remplacée par rien d’autre qui y ressemblerait de près ou de loin.

Venons-en aux explications. Ce ne sont pas seulement les conditions de la garde à vue « à la française » qui posent problème, c’est aussi, en effet, son existence même. La garde à vue, le professeur Vedel l’a jadis souligné, est une atteinte gravissime aux Droits de l’Homme, une entrave majeure à la liberté d’aller et de venir, premier droit du citoyen.

Qu’un avocat accompagne aujourd’hui le gardé à vue durant les interrogatoires policiers est donc, ne serait-ce que pour respecter le droit européen, le moins que l’on puisse faire. Mais, encore une fois, c’est notoirement insuffisant. Pourquoi ?

Tous les gardés à vue évoquent une épreuve psychologique terrible. Et que dire de l’insalubrité, de la saleté répugnante de la plupart des locaux d’« accueil » des personnes détenues ?

C’est pourquoi la garde à vue est une mesure indéfendable, et plus encore dans un régime qui se veut démocratique et soucieux de la dignité humaine. Elle l’est par ailleurs parce qu’elle ne bénéficie pas des réelles garanties judiciaires qui accompagnent en principe l’exercice de pouvoirs administratifs susceptibles de léser les libertés individuelles. Il y a bien sûr un magistrat décideur : le procureur de la République, mais outre le fait que ce magistrat agit sous l’autorité du Garde des Sceaux – ce qui fait toujours douter de sa totale indépendance, et donc de sa qualité d’« autorité judiciaire » –, il faut souligner que, dans nombre d’affaires, au moins celles de faible gravité (ou supposées telles), faute de temps pour examiner chaque dossier, il « couvre », ou, pour dire les chose moins sèchement, confirme les décisions déjà prises en amont par les services de police ou de gendarmerie. Ce qui fait de la garde à vue, à cet égard, d’abord une expression du pouvoir policier. Ce n’est pas acceptable.

Il faut donc – et le plus tôt sera le mieux – limiter cette mesure. Ne la conservons, faute de mieux, que pour les flagrants délits et les crimes d’une particulière gravité. Dans les autres cas, inventons par exemple une « audition de témoignage » au domicile des personnes soupçonnées d’infractions délictuelles.

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