Jean-Claude-Gayssot

Jean-Claude Gayssot sur la grève à la SNCF : « Tout le monde doit lâcher du lest ».

Alors que la grève des cheminots a été reconduite lundi pour un septième jour consécutif, Jean-Claude Gayssot, ministre des Transports sous Jospin entre 1997 et 2002 et ancien cadre du PCF, décrypte pour leJDD.fr comment se déroule ce type d’épreuve de force. « Si vous jouez les gros bras, la discussion (avec les syndicats) ne peut pas s’entamer », explique-t-il. A lire également sur www.lejdd.fr

Vous avez dû gérer une grève nationale en 1999. Comment négocie-t-on avec les syndicats de la SNCF?
Il n’y a pas de méthode particulière, en comparaison aux pilotes de ligne ou aux routiers qui peuvent tout autant bloquer le pays. Quand j’étais ministre, je partais toutefois d’un principe : dès lors qu’une grève était décidée par une organisation forte comme la CGT Cheminots, je convoquais une réunion de travail avec les syndicats en annonçant d’emblée que tout le monde doit lâcher du lest. Si vous établissez un rapport de force à tout prix et jouez les gros bras, la discussion ne peut pas s’entamer.

Le Premier ministre Manuel Valls et son secrétaire d’Etat aux Transports, Frédéric Cuvillier, jouent-ils aux « gros bras », en déclarant que la grève n’est « pas responsable »?
Ni Frédéric Cuvillier ni sa ministre de tutelle Ségolène Royal ne sont dans le rapport de force, puisqu’ils avancent des idées tous les jours. Et notamment la taxation du transit routier pour financer les travaux d’infrastructure du rail. Maintenant, est-ce qu’ils ont tout fait pour éviter le conflit? Je n’en sais rien. Il faut voir aussi la responsabilité des syndicats. La grève doit toujours rester le dernier recours possible dans un débat. Un syndicat comme Sud-Rail, qui décide régulièrement des grèves nationales et reconductibles à l’infini, est trop dans le jusqu’au-boutisme.

«Trouver l’issue de cette grève doit être l’obsession du gouvernement.»

Comprenez-vous les critiques des syndicats qui ne sont pourtant pas opposés à une réforme ferroviaire?
Ils ont réclamé une réforme qui permettait une réelle réunification du système ferroviaire, divisé par mon prédécesseur Bernard Pons (en 1996 sous Alain Juppé, Ndlr). S’il y a difficulté aujourd’hui, c’est parce que nous n’allons pas vers cette réunification de la SNCF et de Réseau ferré de France (RFF). Au contraire, la séparation entre l’exploitation du réseau et les infrastructures va se concrétiser. Si cela n’avait pas été le cas, la grève aurait pu être évitée.

Frédéric Cuvillier a indiqué dans le JDD qu’avec sa réforme, « l’Etat reprend la main sur le rail ». Contestez-vous cette affirmation?
J’avais le sentiment que Frédéric Cuvillier, la SNCF et les cheminots étaient dans un état d’esprit de dialogue. Mais le projet de loi n’est de toute évidence pas abouti. Le rôle de l’Epic dominant, la place des organisations syndicales, le poids des régions – qui financent le réseau TER – ne sont pas clairement définis. Le gouvernement nous dit que les députés de la majorité vont amender le texte lors du débat parlementaire. Mais pourquoi le projet de loi n’a-t-il pas été amendé dès sa rédaction? Pourquoi attendre son passage au Parlement?

La grève a été reconduite jusqu’à mardi et le mouvement social se durcit côté SNCF. Risque-t-on un dialogue de sourds?
Trouver l’issue de cette grève doit être l’obsession du gouvernement. Un compromis doit être trouvé, mais sans que les deux parties, l’Etat et les syndicats, ne sortent humiliées. Cela semble bloqué aujourd’hui, mais l’issue est sans doute possible par le biais parlementaire.

Une INTERVIEW publiée dans le JDD Dimanche 16 juin 2014

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