La Jeunesse mérite mieux que la fosse commune, non ?

fize 2 Il n’y a encore quelques années les jeunes se disaient inquiets pour le monde mais plutôt optimistes pour eux-mêmes. Et puis la réalité a rattrapé cet égarement de lucidité. Les jeunes se sont rendu compte que, non seulement leur avenir était compromis, mais également qu’ils ne vivraient pas aussi bien que leurs aînés. Alors, ils s’inquiètent aujourd’hui de cette triste destinée. D’abord, la société les a rassurés en leur disant qu’avec une bonne orientation, une bonne formation, un diplôme, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes libéraux possible. Alors, courageux, ils ont soigné leur orientation, affiné leur formation, passé les diplômes. Au commencement, cela a marché et les diplômés s’en sont plutôt bien tirés. Pour les autres, les mal ou les peu formés, les sans-diplômes, nos gouvernants inventaient différents dispositifs, qui ont eu pour principal effet de sauver la face des gouvernements inspirateurs, un peu moins d’améliorer le sort des « assistés ». Ainsi, depuis trente ans, se succèdent TUC, CES, et autres emplois « aidés », incarnation de ce « traitement social » qui tient lieu, pour les jeunes, de « traitement économique ».

Aujourd’hui, si les jeunes sans qualification demeurent les premiers naufragés de notre système économique, les autres, les « nantis des diplômes », sont frappés à leur tour Le diplôme ressemble de plus en plus à un parapluie percé. Nul n’ignore plus qu’il y a les bons et les mauvais diplômes. Certaines enquêtes montrent ainsi que le diplôme le plus « fort » (supérieur à bac + 5 ou 6) n’est plus nécessairement le mieux accueilli dans les milieux professionnels. Ces diplômés sont chers et puis ils ne correspondent plus toujours aux besoins économiques actuels. On assiste par ailleurs, pour ces mêmes diplômés, à l’allongement de la durée entre la fin des études et l’accès à l’emploi. Neuf mois après leur fin d’études, un tiers des diplômés de l’enseignement supérieur (universités et grandes écoles) se trouvent toujours sans emploi. A ces difficultés, s’ajoutent le difficile accès au logement, aux soins, aux loisirs parfois. Au final, plus de 20 % des jeunes se retrouvent, en 2009, au-dessous du seuil de pauvreté, dont une moitié des étudiants, plongés désormais dans la précarité.

Le diagnostic étant posé, comment répondre à cette violence faite aux jeunes ? Chacun sait que les jeunes aspirent à la fois à la réussite scolaire, à une vraie formation, un vrai travail avec un vrai salaire pour se loger et se soigner correctement. On oublie qu’à l’image des femmes, les jeunes ne réclament pas seulement des emplois et de l’argent (pour vivre décemment), ils veulent aussi des responsabilités et une reconnaissance sociale. Ils veulent être des acteurs politiques à part entière, des citoyens « participatifs », comme les autres. Un signe politique fort consisterait à leur donner un grand ministère que l’on pourrait nommer « Ministère de la Jeunesse et de la solidarité entre générations ». Le Haut Commissariat à la Jeunesse est ici une préfiguration intéressante d’un tel ministère. On pourrait encore, comme l’a recommandé la commission Hirsch, mettre en place un Conseil représentatif de la Jeunesse, sur le modèle du Conseil économique et social. On pourrait ensuite élargir les droits civils et politiques de cette même jeunesse, des mineurs en particulier. Ceux de 15-17 ans se plaignent souvent d’être tenus pour des citoyens de second rang. Leur accorder, à 16 ans, comme nous le suggérons depuis plus de dix ans, le droit de présider une association – mesure qui figure dans le Plan Jeunes du Président Sarkozy -, est une bonne idée. Allons plus loin, inventons une « majorité sociale » et reconnaissons, toujours à 16 ans, le droit de vote aux élections municipales : ce serait une seconde bonne idée. D’autres mesures sont envisageables, comme la définition d’un quota de jeunes (de moins de 25 ans) dans les instances dirigeantes des partis politiques et des syndicats. Une telle mesure s’accompagnerait de la suppression des mouvements de jeunesse politique et des « branches jeunes » des syndicats professionnels, qui n’influent en rien sur les choix et décisions de leurs aînés et qui, de plus, contribuent à maintenir les jeunes dans des divisions artificielles, loin de leurs intérêts de classe (d’âge). La chose est sûre, ce n’est pas seulement d’un avenir économique dont les jeunes rêvent, c’est aussi d’un avenir politique au sein d’une nouvelle démocratie, plus participative. [1]


[1] Cf. L’individualisme démocratique (à paraître aux Ed. de L’œuvre, janvier 2010).

Pour contacter directement l’auteur : michel.fize@club-internet.fr

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