La mise en examen de M. Courroye : une bonne nouvelle pour la démocratie

fize 2 Une chose est l’indépendance des magistrats, nécessaire ; une autre l’est tout autant : le contrôle des actes des représentants de l’autorité judiciaire, accomplis « au nom du peuple français », ce qui n’est tout de même pas rien. L’exemplarité est donc le moins que l’on puisse attendre des magistrats de tous rangs.

La mise en examen du Procureur de la République de Nanterre, Philippe Courroye,  est, pour cette raison – et sans préjuger du fond – plutôt une bonne nouvelle pour la démocratie. Si, comme le rappelait récemment, le directeur du Monde, Eric Izraelewicz, une telle mesure ne préjuge en rien de la culpabilité du mis en examen qui peut toujours se prévaloir de la présomption d’innocence, dans le cas d’espèce elle indique clairement, et fort justement, que les juges, qu’ils soient d’instruction ou d’audience, que les procureurs, qu’ils soient de la République ou généraux, ne sont pas au-dessus des lois. Même s’ils accomplissent des fonctions régaliennes, ces personnages, dont la tentation, on le sait, existe parfois à se vivre comme des « hauts dignitaires de l’Etat », sont avant tout des citoyens, des citoyens comme les autres, soumis aux mêmes règles que n’importe quel citoyen.

Que M. Courroye déclare aujourd’hui qu’« avec sa mise en examen on ouvre une boîte de Pandore qui pourrait conduire à poursuivre indûment 1 beaucoup de magistrats », 2 en dit long sur ce « complexe de supériorité » d’une certaine magistrature. Je le dis donc franchement : ce propos est proprement inacceptable. Nombre de Français de condition plus modeste que Philippe Courroye sont victimes, chaque jour, de mises en examen abusives, excessives, qui, après les investigations judicaires, se révèlent « indues », selon le mot du même Philippe Courroye. Ont-ils le choix de s’y soustraire ? Non.

Les faits reprochés à M. Courroye : « collecte illicite de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal et illicite », « violation du secret des correspondances », sont graves. Sa mise en examen n’est donc, en aucune façon, abusive. A partir de là, il appartiendra naturellement à l’instruction de dire s’ils sont avérés ou non.
De toute façon, et quelle que soit l’issue de cette affaire, il y a manifestement, avec elle, une atteinte à la liberté d’expression de journalistes du Monde, à leur légitime droit de protéger leurs sources. Il y a une atteinte évidente au travail d’un journal réputé « de gauche », par un magistrat, que l’on dit proche du Chef de l’Etat, dans une affaire – Bettencourt –, de surcroît, proche de ce même pouvoir. Cela fait beaucoup de fâcheuses coïncidences, d’éléments troublants, mais, c’est sûr, tant qu’une malhonnêteté n’est pas démontrée, elle n’existe pas. M. Courroye reste donc un magistrat « au-dessus de tout soupçon », mais, redisons-le, pas « au-dessus de la loi ».

Et cela est plutôt une bonne nouvelle pour la démocratie.

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