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Le progressisme: une idée trop sérieuse pour être abandonnée aux « vieux » partis politiques

Idée renaissante, réinstallée en 2009 par le Mouvement Unitaire Progressiste fondé par Robert Hue et quelques amis politiques, le progressisme est (déjà!) récupéré à droite comme à gauche. Mais ne considérons ici que la gauche, si l’on veut admettre que, le progrès étant naturellement associé au mouvement, le progressisme est fondamentalement une valeur des partis et des forces du changement et de la réforme avançante, non de celles de la conservation voire de la réaction (situées traditionnellement à droite).

C’est aujourd’hui principalement du côté des socialistes que le progressisme trouve le meilleur écho. Durant la campagne municipale à Paris, au printemps dernier, la candidate socialiste Anne Hidalgo par exemple n’a eu de de cesse de se présenter aux parisiens comme la candidate progressiste. A présent, alors que les socialistes se sont réunis en Université d’été à La Rochelle, le chef du PS, Jean-Christophe Cambadélis, lui emboîte le pas, au point de déclarer (Le Parisien du 30/08/14) vouloir faire du progressisme le nouveau projet des socialistes.

Mais n’est pas progressiste qui veut! Il ne suffit pas de faire sauter les mots comme un cabri pour leur donner vertu directrice et puissance organisatrice. A l’évidence, l’usage du mot chez les socialistes répond à une panne d’idées, il atteste du dessèchement de l’idéologie du parti de Jaurès. Ecartelé désormais entre une vision social-démocrate (je dirais presque « social-droitière ») et une vision radicale (osons dire « pseudo-gauchiste »), le socialisme à la française est à bout de souffle. Où sont en effet les idées porteuses?

Après le ralliement au « réalisme » politique en 1983-1984, le PS vient, trente ans plus tard, de faire un nouveau bond (en avant?) en adoptant le « patronisme » (doctrine politico-économique qui privilégie la défense des intérêts du patronat au détriment de ceux du prolétariat). Les deux chefs de l’Exécutif, François Hollande et Manuel Valls, portent ainsi, et apparemment sans complexe, cette étonnante préférence patronale. Quant aux autres socialistes qui se veulent, eux, authentiquement de gauche, qu’ils soient frondeurs ou pas, les idées qu’ils développent (quoiqu’utiles): priorité pour une politique de la demande, augmentation immédiate du pouvoir d’achat (pour relancer la consommation), ressemblent tout de même à une soupe mal réchauffée.

Le progressisme, comme l’explique Robert Hue dans son dernier livre (Les partis vont mourir… et ils ne le savent pas, l’Archipel, 2014), est un projet totalement révolutionnaire qui implique l’entrée de la société française à la fois dans une nouvelle dimension économique et dans une nouvelle dimension politique. Le progressisme a incontestablement de hautes exigences. Il veut une économie pleinement humaine, débarrassé d’un productivisme effréné, d’une « croissance pour la croissance » (qui est en réalité au seul service des financiers et des grands patrons surpayés).

fize 2 Il veut toujours plus d’économie solidaire. Il veut une écologie qui soit moins politique, c’est-à-dire partisane, qu’humaniste, placée d’abord et surtout au service des hommes, de leur bien-être et de leur sécurité. Si l’économie progressiste reste productrice de richesses, elle entend les partager plus équitablement entre tous, comme il se doit dans une vraie démocratie sociale (la seule démocratie qui vaille désormais). Cette économie enfin a un nouveau moteur : dans un cadre naturel respecté, les solidarités y sont, et y seront toujours plus, mieux affirmées entre les divers agents économiques, les responsabilités mieux partagées. C’est ce que Robert Hue nomme fort justement l’éco-progressisme.

Le progressisme veut parallèlement une autre politique, une politique qui soit moins partisane mais plus participative, une politique qui soit affranchie de la dichotomie archaïque gouvernants-gouvernés dont les citoyens ne veulent plus, une politique qui, comme dans la sphère économique, soit plus partageuse des responsabilités, des pouvoirs, des fonctions, une politique qui s’élabore ensemble, remontant de bas en haut. Le progressisme veut donc en même temps la fin du cumul des mandats qui empêche le rafraîchissement et le rajeunissement de la vie publique, la représentation proportionnelle qui assure à chaque sensibilité politique la place qui lui revient, un vrai statut des élus qui permette à chaque citoyen d’entrer dans la vie publique et d’en sortir sans pénalité professionnelle.

Voilà esquissé, sans doute trop grossièrement, le « programme progressiste ». Un programme qui, redisons-le, demande de nouvelles énergies politiques, exige le concours massif des femmes et des jeunes… et de nous affranchir définitivement du carcan partisan.

Oui, décidément, le progressisme est une idée trop sérieuse pour être abandonnée aux « vieux » partis politiques.

Un article à retrouver sur www.huffingtonpost.fr

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