Le rêve et les regrets de Robert Hue

Il y a deux Robert Hue dans ce livre bien enlevé, celui de l’ancien secrétaire général du Parti communiste (1994-2001) qui se raconte et celui du président du Mouvement unitaire progressiste (MUP) en quête de « nouvelles constructions collectives » pour remplacer des partis moribonds.

Un article publié dans lemonde.fr le 12 septembre 2014.

Par Michel Noblecourt

Elevé dans le moule communiste, il a vu son père pleurer à la mort de Staline. Infirmier en psychiatrie, faute d’avoir pu être médecin, il loue « l’outil irremplaçable d’épanouissement » des écoles du Parti – son « ascenseur social ». Dans sa jeunesse, il a joué du rock et a vite appris la partition de la place du Colonel-Fabien quand il a succédé – par surprise – à Georges Marchais.

L’« E-PROGRESSISME »

Comme Gorbatchev en URSS, Robert Hue a échoué dans la mutation du PCF. « Les Partis communistes étaient-ils réformables ?, écrit-il. L’Histoire a répondu et son verdict est implacable. C’est non. » Lorsqu’il quitte, en 2001, la direction d’un parti dont la « normalisation » est en marche, il songe à une « scission » mais abandonne vite l’idée.

Aujourd’hui sénateur, celui qui aux législatives de 1997 avait battu Manuel Valls dans le Val-d’Oise est proche de la majorité. Il met en avant son « amicale complicité » avec François Hollande. Et il récuse avec énergie « la faible pertinence de la thèse des “deux gauches”, chère à la gauche dite radicale, pour qui l’une va définitivement dériver à droite, l’autre représentant alors la seule alternative de gauche authentique ». Robert Hue, c’est l’anti-Mélenchon.

Mais l’essentiel du livre est dans son constat de décès des partis politiques. Robert Hue dénonce « l’obsolescence des structures des partis et des appareils politiques ». « L’envie de politique de nos concitoyens est quasi intacte, assure-t-il, mais c’est l’offre politique qui est en inadéquation évidente. » L’ancien « patron » du PCF se borne à esquisser un modèle alternatif : « La mise en oeuvre de nouveaux modes d’organisation politique implique une prédominance des structures horizontales facilitant la démocratie directe. » Il dessine un « mouvement e-progressiste », s’appuyant sur Internet – « une catalyse de l’intelligence collective » – tout en mettant en garde contre les « multiples dérives » de « la démocratie du Web ».

Avec une passion intacte de convaincre, M. Hue dévoile son rêve d’une « révolution progressiste », avec « la construction d’un rassemblement majoritaire des forces progressistes et écologistes, des démocrates, de toutes celles et tous ceux, hors mouvement politique, qui sont attachés au changement ». La « mutation » du PCF était une utopie, avec la « révolution progressiste », M. Hue en a sans doute inventé une nouvelle.

Les partis vont mourir… et ils ne le savent pas, de Robert Hue, L’Archipel, 212 p., 17,95 euros.

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