Spécialiste de la jeunesse et de la violence au CNRS, le sociologue Michel Fize estime qu’il faut éduquer les enfants plutôt que transformer les écoles en forteresses.
FRANCE-SOIR. Que vous inspire l’intrusion hyperviolente de ces jeunes dans un amphithéâtre ?
MICHEL FIZE. Un nouveau pas a été franchi dans l’escalade de la violence. On parlait de violences scolaires, maintenant il faudra parler de violences universitaires. On a atteint un niveau inquiétant. Cependant, peut-on parler de violences scolaires ? Là, il ne s’agit manifestement pas de règlements de comptes entre élèves, mais de délinquants qui investissent une fac, comme ils auraient pu investir un autre lieu. C’est la preuve que la violence est imprévisible et qu’elle peut surgir n’importe où, n’importe quand.
L’université et les lieux scolaires ne sont-ils définitivement plus à l’abri des violences ?
Ce sont les adultes qui évoquent l’école comme un sanctuaire, un lieu sacré, et qui imaginent que la violence extérieure ne devrait pas y pénétrer. Mais pour les plus jeunes l’école est un lieu ordinaire ! On va en classe avec les mêmes codes et les mêmes modes de vie qu’à l’extérieur. C’est un prolongement de son domicile. Il n’y a pas de coupure. Il est donc normal que, s’il y a de la violence à l’extérieur, il y en ait à l’intérieur.
Quelle solution alors pour protéger les écoles ? Faut-il les barricader ?
Cela peut-il être corrigé ?C’est le rôle de l’école d’apprendre aux jeunes la vie en société, de leur enseigner que les conflits ne se résolvent pas par la violence mais par la négociation. Il faudrait leur enseigner également très tôt, et en continu le long de leur scolarité, certaines règles du Code pénal, du Code civil. Mais il ne faut pas s’étonner que, dans une société où l’argent est roi, les plus démunis veuillent aussi s’asseoir à la table de la consommation, quitte à en venir à la violence. Il faut désarmer ces jeunes qui s’attaquent aux autres.
Un article d’Alexandra Gonzalez paru dans Le Figaro du vendredi 12 mars 2010.