Question posée au Premier ministre, Manuel Valls, par Jean-Noël Carpentier, député et porte-parole du MUP, lors de la séance des questions au Gouvernement du mardi 24 juin 2014.
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Carpentier, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
M. Jean-Noël Carpentier. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, le débat sur les budgets rectificatifs est engagé. Ces textes mettent en œuvre le plan d’économie que vous avez annoncé en avril dernier.
M. Guy Geoffroy. Ce n’est pas un plan d’économies, c’est un plan de dépenses !
M. Jean-Noël Carpentier. Vous le savez, ce plan fait débat dans notre majorité. Certains députés du parti socialiste, que la presse qualifie de « frondeurs », s’interrogent. Quant à moi, progressiste, je m’inquiète : la gauche au pouvoir ne serait-elle devenue qu’un gestionnaire des déficits publics ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
On demande beaucoup d’efforts à nos concitoyens, et le sentiment d’injustice dans notre peuple est grand. Pourtant, des solutions trop peu utilisées peuvent améliorer la situation. Renforcer la lutte contre l’évasion fiscale, augmenter les contributions de la finance, préserver le pouvoir d’achat des ménages : c’est avec des mesures positives et non restrictives que nous retrouverons la confiance.
C’est d’ailleurs dans cet esprit, contrairement à la droite, que plusieurs groupes de la majorité font des propositions pour améliorer le quotidien des Français. Certaines d’entre elles ont reçu un écho favorable de votre Gouvernement : je m’en félicite. D’autres, non : c’est dommage !
On le voit, monsieur le Premier ministre, des désaccords à l’intérieur de notre majorité demeurent. Pour autant, son rassemblement dans sa diversité est essentiel. Il conditionne la réussite d’une politique plus juste pour laquelle les Français se sont exprimés en 2012.
Aussi, au-delà des discussions budgétaires d’aujourd’hui, je souhaite savoir comment vous envisagez de répondre aux inquiétudes de la majorité, et, ce faisant, aux attentes des Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et GDR.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député, il faut agir, et tenir. Agir, parce que notre pays a besoin de réformes. C’est tout le sens des chantiers que nous avons engagés : la transition énergétique, la réforme territoriale – le Sénat vient de s’emparer du projet de loi modifiant la carte des régions. Nous évoquions aussi, la semaine dernière, dans cet hémicycle, la question de la santé. Il s’agit aussi de la réforme de l’État, central et territorial, à laquelle travaille Thierry Mandon, le nouveau secrétaire d’État à la réforme de l’État et à la simplification. Nous devons agir pour réformer et pour faire en sorte que notre pays soit plus fort pour affronter les défis de la compétitivité : les Français nous le demandent.
Nous devons aussi agir pour nos entreprises : il est nécessaire de leur redonner des marges. Depuis douze ans, nous avons en effet perdu des milliers d’emplois dans l’industrie, car nos entreprises sont moins compétitives sur la scène européenne et internationale. Nous avons besoin, oui, de baisser le coût du travail, et d’agir pour nos compatriotes les plus modestes, mais aussi pour les couches populaires et les classes moyennes, en baissant les impôts : c’est le sens des deux collectifs – budgétaire et social – que l’Assemblée examinera au cours des jours prochains. Nous devons, là aussi, dire la vérité aux Français : nous vivons au-dessus de nos moyens. Nos entreprises ont besoin de soutien : n’opposons pas l’offre à la demande, car nous avons besoin d’être plus forts et plus compétitifs.
C’est pour cela qu’il faut agir, mais c’est aussi pour cela qu’il faut tenir, monsieur le député. Un cap a été défini par le Président de la République le 14 janvier dernier. J’ai présenté les axes de la politique de mon Gouvernement et j’ai reçu la confiance de l’Assemblée nationale. J’ai donné la feuille de route du Gouvernement à la représentation parlementaire : c’est le sens du programme de stabilité, qui passe aussi par un engagement fort au niveau européen. Le Président de la République souhaite que l’Europe – il l’a écrit dans une lettre adressée au président du Conseil européen, M. Van Rompuy, qui engage la France et le Gouvernement – soit au rendez-vous en matière d’investissements d’avenir, d’énergie, de numérique, et qu’elle entende la voix des Européens, qui se sont exprimés le 25 mai dernier pour l’emploi et la croissance. Il plaide aussi pour que le pacte de stabilité soit mis en œuvre avec lucidité, souplesse, et suffisamment d’intelligence pour ne pas casser la croissance qui, aujourd’hui, s’installe en Europe, notamment en France.