L’ancien secrétaire général du Parti communiste français poursuit sa carrière au Sénat, avec un oeil rivé sur le scrutin de 2012.
«Tant qu’il y aura des injustices, il y aura de la place pour les communistes. » Dans son bureau de la rue de Vaugirard, Robert Hue s’offre une pause entre deux réunions. C’est ici, à Paris, que l’ancien dirigeant communiste poursuit sa carrière politique. Vice-président de la commission des Affaires étrangères du Sénat, président du groupe France-Afrique du Sud, depuis son élection en 2004 l’homme n’a pas chômé. Il l’avoue bien volontiers, le Palais du Luxembourg est un peu devenu sa deuxième maison.
Il y passe le plus clair de son temps, notamment depuis son départ du Parti communiste le 28 novembre 2008.
Il y a un peu plus de deux ans, en effet, le secrétaire national tirait sa révérence après avoir notamment passé sept ans (1994-2001) à la tête du PCF.
« Ce jour-là, je me suis retrouvé définitivement libre », dit-il. Avec le recul, son résultat à l’élection présidentielle de 1995 reste sa plus grande fierté : il avait alors obtenu presque 9 % des suffrages, un chiffre considérable à l’époque. Mais pour s’inscrire dans la durée, anticiper l’avenir, le parti devait selon lui évoluer.
Robert Hue a multiplié les signes d’ouverture, proposé des réformes aux militants. En vain. Sa déconvenue dans la course à l’Élysée de 2002, avec moins de 3 % des voix, provoqua un séisme dans sa formation. « Nous étions arrivés à la fin d’un cycle. J’étais confronté à une dérive gauchisante dans laquelle je ne me retrouvais pas. Un vrai retour en arrière.
Si les communistes français souhaitaient gagner du crédit après la chute du mur de Berlin, il aurait fallu rompre avec ce stalinisme à la française. » Robert Hue aurait souhaité cette rupture avec le système soviétique dès les années 1950. C’est d’ailleurs à cette époque que ce fils d’ouvrier découvre l’engagement politique. Avec son père, il distribue souvent l’Humanité. Le modèle de société à l’Est l’inspire. Le jeune garçon s’imprègne d’un idéal qui lui colle encore à la peau aujourd’hui. « J’estime avoir réussi ma vie de militant », dit-il.
Il va gravir tous les échelons au sein du PCF. Et enchaîner les succès électoraux : maire de Montigny-lès-Cormeilles (Val-d’Oise), député européen, député et enfin sénateur.
Robert Hue a aujourd’hui 64 ans. S’il se fait plus discret sur la scène médiatique, il demeure un fidèle observateur de l’échiquier politique français. « Le PC va continuer d’exister, pronostique-t-il.
Mais il reste enfermé dans un certain nombre de dogmes. Aujourd’hui, il ne peut pas reconquérir de position stratégique à gauche. » Le sénateur a tiré les leçons d’un demisiècle d’engagement. « La jeunesse ne veut plus des partis traditionnels. Si on ne fait pas de la politique différemment, il y a un risque de rejet par l’opinion publique, voire même de révolution. » Robert Hue ne veut plus de « logique de parti ». Après l’officialisation de son départ du PCF en 2008, il annonce la création d’un « Nouvel Espace progressiste » : une association, « boîte à idées » pour relancer la « gauche de la gauche », vite transformée en « Mouvement unitaire progressiste ». Une formation « en gestation » qu’il développe sur Internet.
Loin de l’organisation verticale des autres courants politiques. « C’est l’avenir », estime-t-il.
Avec son mouvement, Robert Hue veut compter dans l’élection présidentielle de 2012. « Il y a un espace à occuper entre le Front de gauche et le Parti socialiste », affirme-t-il. Manifestement, la question le taraude. Par la fenêtre de son bureau, il observe le Palais du Luxembourg. « Je suis obligé d’envisager une candidature. Même si je ne le souhaite pas. »
Un article de THOMAS GUIEN publié dans La Croix du 14 mars 2011.