Solidarité internationale, aide au développement : Robert Hue intervient au sénat.

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, parce qu’il est l’aboutissement des Assises du développement et de la solidarité internationale, le présent projet de loi répond à de nombreuses attentes formulées par tous les acteurs du monde du développement. À ce titre, il recueille déjà notre adhésion.

Sur la forme, cela a été dit, un projet de loi d’orientation et de programmation en matière de politique d’aide au développement est une première. Je m’en réjouis, d’autant plus que nos collègues députés ont enfoncé le clou à l’article 10 en prévoyant que le présent texte aurait une validité de cinq ans. Cette disposition oblige ainsi le Gouvernement à une forme de revoyure. C’est satisfaisant.

Sur le fond, je suis satisfait des nombreuses dispositions qui vont dans le sens de certaines des remarques que nous avons formulées, notamment lors du débat qui a eu lieu dans cet hémicycle sur le développement dans les relations Nord-Sud.

Madame la secrétaire d’État, vous avez parlé d’efficacité, de redevabilité et de solidarité. Nous approuvons naturellement ces grands principes et les mesures que vous proposez pour les mettre en œuvre. Je pense notamment au souhait du Gouvernement de cibler davantage notre aide sur les pays les plus pauvres, avec une attention soutenue à l’Afrique et, en particulier, à sa zone subsaharienne. Nous partageons totalement cette vision.

Comme l’ont indiqué les rapporteurs, si l’Afrique connaît des taux de croissance très dynamiques depuis quelques années, ce rebond est très inégalement réparti sur le continent. J’ai déjà eu l’occasion de le dire, je ne verse pas dans l’afro-pessimisme souvent ambiant, mais force est de constater que, si la pauvreté recule globalement en Afrique, elle demeure profonde dans certaines régions. Plusieurs raisons expliquent ce retard, mais je ne vais pas les énumérer en cet instant. À mon sens, nous devons accentuer nos efforts dans toute une série de domaines, notamment sur la question éducative. Je sais qu’il s’agit d’un enjeu fort, car cela suppose, outre la mobilisation d’infrastructures, une action politique déterminée pour lutter contre l’obscurantisme. Le récent et dramatique enlèvement de 223 lycéennes par Boko Haram au Nigéria nous le rappelle cruellement ; mais cela relève d’un autre débat…

Cela étant, le projet de loi prévoit également de diminuer la fragmentation de l’aide pour améliorer son efficacité. La complémentarité des aides bilatérale et multilatérale de la France est affirmée. C’est une bonne chose.

Pour ma part, j’ajouterai que l’efficacité de l’aide tient aussi à la capacité des populations locales à s’approprier les projets. C’est essentiel, et il faut donc y veiller. Par ailleurs, toujours dans l’esprit de responsabiliser les plus concernés, je me félicite de l’initiative de la commission des affaires étrangères, qui a introduit le dispositif du « migrant banking », lequel complète la démarche des députés sur le microcrédit.

Enfin, je dirai un mot de la responsabilité sociale et environnementale, que la commission a très justement renommée « responsabilité sociétale ». Le drame du Rana Plaza, mais aussi d’autres tragédies moins médiatisées, commande de renforcer l’exigence à l’égard des entreprises qui s’implantent directement ou se fournissent chez des sous-traitants. Il faut bien sûr que ces dernières apportent la garantie d’une totale transparence en termes de gouvernance et de communication.

Mes chers collègues, certains de nos concitoyens pourraient penser que l’aide au développement est semblable au tonneau des Danaïdes, tant l’ampleur de la tâche paraît immense. Pourtant, le bilan des Objectifs du Millénaire pour le développement qui arrivent à échéance en 2015 montre que des progrès significatifs ont été réalisés concernant plusieurs cibles, dont celle de réduire de moitié le nombre de personnes vivant dans une extrême pauvreté. Nous ne devons donc pas relâcher nos efforts. Le présent projet de loi nous propose de poser les fondements de nos engagements. C’est essentiel, mais n’oublions pas que la solidarité n’est pas seulement une affaire de bonnes intentions. Nous devons avoir les moyens de notre politique, ce qui suppose de réorienter à la hausse les crédits de l’aide publique au développement pour atteindre le fameux objectif de 0,7 % du RNB de notre pays.

En attendant, les membres du RDSE soutiennent ce projet de loi, que je qualifierais de fondateur. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)

Intervention de Robert Hue au Sénat dans le débat du projet de loi d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (séance du lundi 26 mai 2014).

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